Contre le grand capital, le camp des travailleurs17/05/20192019Cercle Léon Trotsky/medias/cltnumero/images/2019/05/160.jpg.484x700_q85_box-6%2C0%2C589%2C842_crop_detail.jpg

Contre le grand capital, le camp des travailleurs

Discours d'Arlette Laguiller

Travailleuses, travailleurs, camarades,

Notre courant politique participe aux élections, aux européennes comme à toutes celles où nous en avons la possibilité.

Nous le faisons, comme vient de le rappeler mon camarade Eddy Le Beller, pour défendre une politique communiste révolutionnaire en une occasion qui nous permet de le faire plus largement que nous ne le faisons au jour le jour.

Nous le faisons pour faire entendre la voix de celles et ceux qui considèrent que le capitalisme ne représente pas l’avenir mais le passé. L’humanité crève d’une organisation sociale basée sur l’appropriation privée des richesses, qui devraient appartenir à tous, basée sur le monopole d’une classe privilégiée sur les moyens de production, basée sur la concurrence, sur l’argent. Nous participons à cette campagne électorale pour affirmer que seul le prolétariat, la classe de ceux qui n’ont que leur salaire pour vivre, a collectivement la force de mettre fin à cet ordre social qui impose à l’humanité des souffrances infinies.

Les commentateurs qui prétendent informer l’opinion publique mais qui, en réalité, la fabriquent, s’intéressent au décor, au clinquant du navire, aux occupants de la première classe, mais la vie des soutiers, de ceux qui font marcher les machines, ceux qui nettoient les cabines, ne les intéresse pas. Pour eux, ils n’existent tout simplement pas !

Les manifestations des gilets jaunes ont comme principal mérite d’attirer l’attention des médias sur une partie, et encore une petite, de ceux sur qui pèse le poids de la société, sans qui la société ne pourrait pas fonctionner et qui, pourtant, ont du mal à vivre même lorsqu’ils ont du travail. Et lorsque, chômeurs, ils sont rejetés par la production capitaliste ou lorsque, trop âgés pour suer du profit, ils sont retraités, on tolère seulement qu’ils survivent.

Pour notre part, nous militons en direction de ces soutiers, principalement parmi les travailleurs des grandes entreprises industrielles, commerciales et bancaires, pour les rendre conscients de leurs intérêts, matériels bien sûr mais aussi politiques.

Les élections sont la continuation de notre politique au quotidien par d’autres moyens. Elles s’intègrent dans nos efforts pour construire ou plus exactement pour reconstruire dans ce pays un parti communiste révolutionnaire.

L’histoire du mouvement ouvrier, rien que dans ce pays, a connu plusieurs tentatives pour créer des partis qui avaient pour raison d’être, non seulement la défense des intérêts matériels des travailleurs, mais surtout la perspective de leur émancipation par la révolution sociale.

C’est le courant socialiste qui a représenté cette perspective pendant toute une période avant de basculer dans le camp de la bourgeoisie et de se mettre à son service. En commençant par aider chacun sa bourgeoisie à embrigader les travailleurs dans la boucherie de la première guerre impérialiste mondiale. Puis, lorsque les horreurs de la guerre ont conduit au réveil révolutionnaire du prolétariat européen, en l’empêchant de se joindre aux prolétaires de Russie pour renverser le capitalisme. Les partis socialistes ont été relayés par les partis communistes qui, après avoir représenté un immense espoir, ont basculé d’abord sous la tutelle de la bureaucratie ex-soviétique. Et ils ont à leur tour fini par s’intégrer dans l’ordre bourgeois par un autre cheminement que celui des partis socialistes, mais aussi en participant à des gouvernements bourgeois comme en 1944-1947, puis en 1981.

Depuis, les deux partis, naguère ouvriers, sont devenus des défenseurs de l’ordre bourgeois, de ses institutions, de ses valeurs.

Oui, le combat du prolétariat pour son émancipation a connu bien des défaites et des trahisons.

Ces trahisons ont été de véritables catastrophes qui ont rejeté, à chaque fois, le mouvement ouvrier des décennies en arrière. Les conséquences en ont été d’autant plus graves que les trahisons venaient d’organisations en qui les travailleurs avaient confiance, et qui avaient été construites au fil du temps grâce aux efforts, au dévouement, au sacrifice de générations d’ouvriers.

Toutes ces trahisons du passé ont pesé. Et elles continuent de peser jusqu’à présent. Elles ont permis à la bourgeoisie de désamorcer ou de surmonter des crises sociales majeures. Elles ont aidé la bourgeoisie à perpétuer l’exploitation. Mais ces batailles gagnées par la bourgeoisie n’ont pas mis fin à la guerre sociale. La lutte de classe continue, alimentée sans cesse par l’exploitation capitaliste elle-même, par toutes les formes d’oppression qui en découle, par toutes les formes d’injustice qu’elle engendre, par toutes les guerres que la concurrence suscite. À notre époque de sénilité du capitalisme, ses pires aspects s’aggravent, et les aspects progressistes de ses débuts disparaissent.

Alors, nous avons confiance dans l’avenir parce que nous avons confiance dans la classe ouvrière et dans sa capacité à reprendre le combat. 

Les tremblements de terre les plus puissants qui ébranlent la planète sont le résultat d’une multitude de mouvements tectoniques indécelables, d’une multitude de forces qui se déploient et se heurtent sans que l’on puisse prévoir le moment où ces mouvements font trembler la terre. La crise actuelle de l’économie capitaliste, avec toutes ses conséquences pour les classes populaires et, au-delà, pour toute l’humanité, prépare les futurs ébranlements sociaux. Il appartiendra alors au prolétariat d’en prendre la tête.

Notre génération est un chaînon dans la succession d’affrontements qui traversent l’histoire du capitalisme et qui opposent les deux classes sociales fondamentales : la bourgeoisie et le prolétariat. Elle a à apporter une réponse satisfaisante au besoin sans cesse renaissant de recréer un parti communiste révolutionnaire. Le combat pour le reconstruire ne s’achèvera que par le renversement du pouvoir politique de la bourgeoisie et la réorganisation de la société sur une base nouvelle, sans exploitation, sans oppression.

Ce parti ne pourra se développer pleinement, acquérir la confiance des travailleurs, que dans des périodes de remontée ouvrière. C’est à ces moments et dans la lutte que les militants ouvriers et l’organisation communiste révolutionnaire elle-même pourront acquérir le crédit et la compétence nécessaires pour faire face aux appareils d’État et aux multiples institutions qui se placent sur le terrain de la préservation de l’ordre social existant.

Mais même les périodes où le gros de l’armée du prolétariat n’est pas mobilisé, voire ne se sent pas du tout concerné et se désintéresse de la politique, même ces périodes permettent de transmettre des idées, des valeurs, une conscience qui permettront à la classe ouvrière d’être de nouveau armée politiquement pour être en situation d’affronter la bourgeoisie et, surtout, de gagner la guerre sociale qui conduira à son émancipation.

Discours de Ghislaine Joachim-Arnaud

L’histoire de l’impérialisme français a fait que je suis française et européenne bien que je vive et que je milite en Martinique, à 7000 km d’ici. Il en est de même pour mon camarade Jean-Marie Nomertin, également sur la liste Lutte ouvrière, qui vit et milite en Guadeloupe, ainsi que pour Jean-Yves Payet qui réside et milite à La Réunion.

Nous sommes conviés à nous prononcer sur l’avenir de l’Europe, en même temps que des dizaines de milliers d’électeurs dispersés de l’océan Pacifique à l’océan Atlantique, de Tahiti à la Guyane, de Mayotte à St-Pierre-et-Miquelon.

Cette situation juridique résulte de plusieurs siècles d’histoire, marqués par le brigandage capitaliste à l’échelle du monde, du trafic d’esclaves au génocide de peuples amérindiens et de bien d’autres. Marqués aussi par l’économie de plantation, à laquelle nombre de ces peuples dispersés ont dû participer, certainement pas de gré, mais de force, qui a construit la fortune de la grande bourgeoisie française.

Alors, notre présence sur la liste, c’est une protestation contre tout ce passé et surtout contre la façon dont ce passé se perpétue encore aujourd’hui de multiples manières, ne serait-ce que parce que les parasites les plus riches sur le sol des Antilles dites françaises sont les descendants des anciens propriétaires d’esclaves.

Oh, l’esclavage de l’ancien temps a été remplacé par une autre forme d’esclavage, l’esclavage salarial ! Mais la domination sociale est toujours exercée par une minorité, mélangeant actionnaires des grandes sociétés modernes et descendants d’esclavagistes.

Eh bien, malgré la dispersion des confettis qui restent de l’ancien empire colonial français, les opprimés des Antilles jusqu’à la Polynésie en passant par La Réunion ou Mayotte ont en commun justement d’être des exploités et des opprimés !

Et nous nous retrouvons tout naturellement avec nos sœurs et nos frères de classe, quels que soient le lieu où ils vivent et la couleur de leur peau.

L’Union européenne, les gouvernements français et les dirigeants locaux veulent nous faire croire à longueur de temps que nous devons tout à la soi-disant manne européenne, comme à celle de l’état français. Nous serions non seulement des assistés de la France mais aussi ceux de l’Europe. Nous ne serions que des estomacs gavés avec un entonnoir par lequel couleraient les millions de l’Europe.

Les assistés, oui il y en a, mais ce sont les capitalistes, les classes riches qui reçoivent de l'Union européenne et de l'état français régulièrement des millions d'euros de subventions et d'aides.

La défiscalisation en outre-mer et les nombreuses niches fiscales font des ex-colonies françaises pratiquement des petits paradis fiscaux pour le grand patronat, les riches, la classe aisée. Beaucoup de riches aussi n'ayant jamais mis les pieds ni en Guadeloupe ni en Martinique placent leur argent dans les îles car investir là-bas c’est bénéficier d’une niche fiscale. Et en grande partie dans l'immobilier.

Mais cela ne nous change pas beaucoup par rapport aux plus beaux temps des colonies, car bien des capitalistes, qui exploitaient jusqu'au sang les travailleurs de la canne à sucre et qui possédaient les sociétés anonymes sucrières, comme feu le baron Empain par exemple, ne sont jamais venus aux Antilles, se contentant d'empocher les profits à 7000 km. Et c'était le cas pour bien des sociétés capitalistes qui prospéraient dans les colonies d'Afrique et d'Asie.

Alors, l'Union Européenne ne fait que reprendre à son compte la vieille politique coloniale.

En 2015, l'UE déclarait, et cela toujours en faveur des capitalistes et des riches : " l’Union Européenne confirme que les aides à l’investissement outre-mer sont conformes au droit communautaire ".

Les assistés ne sont donc pas ceux qui travaillent de 8 h jusqu'à parfois 10 h par jour pour des salaires de misère, et ce ne sont certainement pas les chômeurs permanents dont le taux varie, même d’après les chiffres officiels, de 11,6 % en Nouvelle Calédonie à 35 % à Mayotte en passant par les 22 % aux Antilles-Guyane et 24 % à La Réunion.

On nous dit que les routes, les ponts, les hôpitaux, les écoles et autres réalisations sont dus à la manne européenne, comme ils étaient, nous disait-on jadis, dus aux dits « bienfaits de la colonisation ». De grands panneaux publicitaires sont là pour nous rappeler sans cesse que « l'Europe a fait ci, l'Europe a fait ça ».

Mais ce n’est pas pour nous, travailleurs et population laborieuse, que tout cela est réalisé.

Ce sont les grosses sociétés qui bénéficient des marchés ouverts par l’argent public dont celui de l’Europe. Ce sont ces sociétés qui en tirent des profits en perpétuant les bas salaires, les conditions de travail pénibles pour empocher le plus de profits possible.

Si, par exemple, en Martinique, les fonds européens ont participé pour plus de 60 millions d’euros à la réalisation du TCSP (transport en commun en site propre), ils rapportent surtout subventions et gros profits aux capitalistes de la multinationale Vinci.

Dans l'agriculture, ce sont les plus gros planteurs de banane, et singulièrement des descendants des vieilles familles d'origine esclavagistes comme les Hayot ou les Aubery, qui empochent subvention sur subvention européenne. L'entonnoir, c'est eux qui l'ont et par lequel ils sont gavés de millions.

Au total, 129 millions d'euros de subventions ont été versés aux planteurs de banane des Antilles françaises en 2017 ! Et il en est ainsi chaque année.

Ce sont les plus gros planteurs qui perçoivent le plus gros des subventions, car elles sont versées au prorata de la surface plantée et de la production.

Les voilà, les assistés de l'Europe et de l'État français. Et ces subventions, ils les reçoivent après avoir déjà accaparé le profit tiré de l'exploitation éhontée des travailleurs de la banane. Il en est de même pour une série de possédants de grosses entreprises agricoles dans le secteur de l'élevage, de la viande, du bâtiment, des ponts et chaussées.

Certains gros planteurs aux Antilles sont même déçus qu’il n’y ait pas plus de cyclones ou de grands vents car, après, ils empochent à ces occasions toutes sortes d'aides et subventions européennes supplémentaires et mettent leurs travailleurs en chômage technique. Alors, parfois, ils inventent et transforment un vent en cyclone pour toucher plus de subventions.

La grève des ouvriers de la banane en 2017 en Guadeloupe a mis en lumière les conditions de travail infernales des ouvriers sur les plantations et le non respect des droits les plus élémentaires des travailleurs. Port de plusieurs tonnes de bananes à bras d'hommes et plusieurs kilomètres à effectuer à pied ainsi chaque jour. Sans compter le non respect par les patrons de certains jours fériés, et des heures de travail légales. À cela viennent s'ajouter les déformations morphologiques, les maladies musculo-squelettiques dues au travail répétitif, les maladies respiratoires, les maladies de peau, les cancers dus aux pesticides, une surmortalité chez les ouvriers agricoles en raison des pesticides comme le chlordécone et toute une série d'autres aussi nocifs.

Ce n'est que par leur lutte constante que les ouvriers agricoles parviennent à se faire respecter un peu plus face à leurs patrons et à freiner la dégradation de leurs conditions de travail.

Dans l'outre-mer, les séquelles coloniales, qui s'ajoutent à l'exploitation capitaliste ordinaire, suscitent des luttes ouvrières fortes depuis de nombreuses années et des poussées de fièvre sociale. Ce fut le cas en Guadeloupe, Martinique, Guyane et à La Réunion en 2009.

En mars avril et mai 2017, les travailleurs de Guyane et la population laborieuse ont déclenché une révolte générale contre la dégradation de leurs conditions de vie et de travail !

C’est dans l’île de La Réunion que le mouvement des gilets jaunes a pris le plus d’ampleur.

Aux Antilles, les grèves sont fréquentes, dures et parfois longues. La dernière en date fut celle des salariés de Carrefour-Milenis-Promocash, en particulier les caissières, qui a duré 80 jours, de novembre à mars dernier.

Ce sont ces luttes qui dans le passé ont permis aux travailleurs d'obtenir même les maigres avantages qu'avaient déjà obtenus leurs frères de classe en France. Il a fallu des années de lutte pour que les travailleurs antillais, guyanais, réunionnais obtiennent ne serait-ce que le même SMIC que dans l'hexagone, les mêmes allocations familiales et sociales.

Dans les ex-colonies françaises, il y a le feu sous la cendre. Ce sont des brulots sociaux qui s'enflamment périodiquement, comme en 2009 le mouvement contre la « profitation ».

En votant pour la liste "Contre le grand capital, le camp des travailleurs", les travailleurs d'outre-mer comme les travailleurs de France, ne changeront pas les choses. Mais ils pourront s'exprimer contre l'exploitation capitaliste et impérialiste de l'État français.

Dans ses ex-colonies où tant de décisions sont prises par l’État central, à 7000, 10.000, voire 12.000 km de distance, sans se préoccuper de l’avis des populations locales, leur servir cette pseudo-démocratie qui consiste à les faire se prononcer sur l’Europe dénote un mépris cynique.

Il n'est alors pas surprenant que la population d'outre-mer ne se sente pas concernée par ces élections. Et cela se traduit par une abstention record à l'élection européenne dans les pays d'outre-mer. 90 % d'abstention en Guadeloupe en 2014 et plus de 88 % en Martinique, 90 % en Guyane, près de 80 % à La Réunion.

Ce mépris pour les confettis de l'ex-empire colonial français, eh bien, nous pouvons le retourner à l'envoyeur en le lui faisant savoir, et cela dans son propre jeu électoral faussement démocratique !

Nous, c'est-à-dire les travailleurs, nous, les membres des classes populaires, travailleurs, jobeurs, chômeurs, petits paysans ou petits marchands, parce que c'est nous qui subissons le plus ce mépris, pas seulement lors des élections européennes mais tous les jours, parce que les exploités, les plus dominés, ceux qui subissent le plus le racisme et les séquelles coloniales, c'est nous. Bien sûr, nous le leur renvoyons en pleine figure lors de nos manifestations et de nos grèves !

Mais, en votant pour la seule liste qui se revendique du camp des travailleurs, nous pouvons affirmer notre appartenance à ce camp et notre approbation des exigences mises en avant par cette liste : pour des augmentations de salaire, pour des embauches massives et la répartition du travail entre tous sans diminution de salaire.

Les électeurs de ce qu’il reste de l’ancien empire colonial français ont, certes, toutes les raisons de se désintéresser de ces élections. Mais s'abstenir n'est pas toujours la meilleure des solutions. Elle l'est lorsque nous n'avons pas d'autre choix. Or là, il se trouve que les travailleurs d'outre-mer ont le choix de dire, par leur vote pour la liste de Lutte ouvrière, que nous sommes exploités en tant que travailleurs, dominés et méprisés en tant que peuple.

Alors disons-le ! Disons-le en mettant un bulletin pour la seule liste qui milite pour la fin du système capitaliste !

Discours de Jean-Pierre Mercier

Cette campagne pour les élections européennes est l’occasion, pour tous les politiciens de la bourgeoisie, de nous servir leurs mensonges sur l’Europe. 

Pour les uns, du côté des souverainistes de droite comme de gauche, l’Europe est la cause de tous nos malheurs. Elle représenterait la fin de ce qu’ils appellent « l’indépendance nationale ». Et le chômage, la pauvreté qui grandit dans la classe ouvrière, le recul des droits des travailleurs, seraient autant de fléaux dus aux « diktats de Bruxelles ».

Pour les autres, du côté de Macron, de ce qu’il reste du PS ou de la droite classique, la construction européenne est au contraire un monde merveilleux de paix, de fraternité et d’unité entre les peuples. C’est « l’Europe qui protège », comme le dit la candidate de Macron. 

Les uns comme les autres mentent, et ils mentent consciemment.

L’Europe n’est pas plus responsable des maux qui frappent le monde du travail qu’elle n’est une protection pour celui-ci. Elle n’est ni plus ni moins démocratique que l’État français, ni plus ni moins protectrice. 

Elle n’empêchera même pas demain, si la situation économique et les intérêts des impérialismes rivaux l’exigent, que de nouvelles guerres éclatent au sein du continent européen. 

Parce que la cause des fléaux qui frappent la classe ouvrière, ce n’est pas l’Europe : c’est le système capitaliste. 

L’Union européenne, c’est simplement une organisation qui se superpose aux États capitalistes pour organiser la domination de la grande bourgeoisie en Europe. Une sorte d’associations de malfaiteurs à l’échelle d’une partie du continent.

Concrètement, pour nous les travailleurs, qu’est-ce que c’est que cette « Union européenne » ? 

C’est une série d’accords économiques et commerciaux qui ne garantissent qu’une chose : la libre circulation des capitaux et des marchandises entre moins d’une trentaine d’États et une monnaie unique conçue seulement pour faciliter les échanges commerciaux entre capitalistes. 

Pour le reste, l’Union européenne est une illusion, car les États nationaux restent maîtres chez eux – en tout cas, pour les plus riches d’entre eux comme la France.

Il y a certes une chose sur laquelle les capitalistes ont unifié l’Europe – mais ils n’ont pas eu besoin de l’Union européenne pour le faire : c’est la situation sociale dramatique des classes exploitées des pays qui la composent. Car il y a une chose que tous les travailleurs d’Europe partagent d’une façon ou d’un autre, c’est le chômage et l’exploitation.

Certaines régions d’Europe sont littéralement dévastées par le chômage, par les fermetures d’entreprises en cascade. 

Même d’après les statistiques officielles, dont on sait à quel point elles atténuent la réalité, dans plusieurs régions d’Espagne, d’Italie, de Grèce, de Grande-Bretagne, le chômage approche ou dépasse les 30 %. Un travailleur sur trois laissé sur le carreau ! À Mayotte qui, comme l’a dit Ghislaine, fait partie de l’Union européenne bien qu’étant en plein océan Indien comme héritage du passé colonial français, le chômage dépasse même les 35 %. Sur l’ensemble de la Grèce, le chômage dépassait encore les 19 % l’an dernier et les 15 % en Espagne.

Et si les statistiques officielles indiquent des taux de chômage très inférieurs dans certains pays de l’Europe de l’Est, il n’y a aucun miracle économique là-dedans : il n’y a que la rapacité du patronat, qui profite des salaires de famine en vigueur dans ces pays pour y rouvrir des usines. En République tchèque, le salaire minimum est de 518 euros brut par mois ; en Hongrie 464 euros. En Bulgarie 286 euros par mois. 

Ce n’est pas pour rien que des dizaines de milliers de travailleurs bulgares ou roumains fuient leur pays pour venir tenter leur chance en Europe de l’Ouest. C’est parce que leurs pays constituent le Tiers monde de l’Europe, où même en travaillant, on ne peut pas vivre. 

C’est donc ça que ces politiciens bourgeois appellent une « Union ».

Un groupe de pays dans lequel ils n’ont même pas été capables de créer un salaire minimum commun permettant de vivre dignement. Où, grâce à l’Union douanière et à la libre circulation du capital, un capitaliste français, allemand ou britannique peut d’un claquement de doigts fermer une usine dans son pays d’origine et la déplacer dans un pays où les salaires sont si dérisoires que ses profits s’en trouveront multipliés par deux ou dix. Ou, en d’autres termes, les travailleurs n’ont d’autre choix que de crever de misère au chômage dans certains pays, ou de crever au travail pour des salaires qui permettent à peine de survivre, dans d’autres.

Exactement comme le disait Lénine, il y 100 ans à propos de la Société des nations – l’ancêtre de l’Onu – la Commission européenne n’est qu’une « caverne de brigands » qui ne savent s’entendre que quand il s’agit de dépecer les peuples à leur profit. Capables, peut-être, de créer une monnaie commune quand cela sert leurs intérêts, mais incapables ne serait-ce que d’imposer cette avancée élémentaire que serait la légalisation de l’IVG partout en Europe ! 

Et même politiquement, l’Union européenne est une chimère. Quelle égalité peut-il exister dans le monde capitaliste, entre des puissances impérialistes comme la France et l’Allemagne d’un côté, et de l’autre, des pays qui n’ont jamais été autre chose que des vassaux de puissances plus riches et militairement plus puissantes qu’elles ? 

Au sein même de l’Union européenne du 21ème siècle, les mêmes rapports de domination impérialiste subsistent, exactement comme ils ont subsisté au XIXe et au XXe siècle. 

Avez-vous déjà vu beaucoup d’usines roumaines ou de banques bulgares s’installer en France ? Combien de travailleurs, ici, travaillent pour un capitaliste hongrois ? Pas beaucoup, et c’est peu de le dire ! Par contre, ils sont des millions de travailleurs roumains, bulgares, polonais, hongrois, à suer tous les jours du profit dans les usines françaises ou allemandes installées là-bas.

Et cette domination économique se traduit directement par la domination politique qui, forcément, va avec. 

En Europe, tous les États sont égaux paraît-il, mais il y en a qui sont plus égaux que d’autres. Il n’y a en fait qu’une poignée d’États – les anciennes grandes puissances coloniales – qui font la pluie et le beau temps au sein de la Commission européenne. Il n’y a qu’à se rappeler l’année 2011, au plus fort de la crise grecque, lorsque le Premier ministre grec d’alors, Georges Papandreou, avait été convoqué comme un laquais au G20 de Cannes par Sarkozy et Merkel et obligé de faire antichambre pendant plus de deux heures avant d’aller mettre un genou à terre devant les maîtres de l’Europe capitaliste ! 

Il y a d’ailleurs, vraiment, beaucoup d’indécence de la part des souverainistes à la Mélenchon, lorsqu’ils osent affirmer que « la France », comme ils disent, est « opprimée », « vassalisée » par l’Europe. 

Parce que, qu’ils le veuillent ou non, si certains États peuvent en effet se plaindre d’être traités comme quantité négligeable par l’Union européenne, la France n’en fait certainement pas partie ! 

L’État français, avec sa puissance économique, financière et militaire, fait au contraire partie de ceux qui tiennent le fouet en Europe, ceux qui dictent les règles et les imposent. 

C’est la Société générale, bien française, qui a contribué à ruiner la Grèce, pas l’inverse ! Parce que dans ce système capitaliste absurde, une seule grande banque est bien plus puissante que bien des États. Et n’en déplaisent à ceux qui, dans le but unique de flatter les préjugés nationalistes, prétendent que la France est « vassalisée » par la Banque centrale européenne, la BCE, et bien il faut rappeler qu’à eux quatre, la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et l’Italie possèdent 58 % du capital de la Banque centrale européenne ! Quand la Slovaquie, par exemple, en contrôle 0,77 %. 

À votre avis, qui prend les décisions ? Qui est le seigneur et qui est le vassal ?

Alors oui, pendant cette campagne européenne, bien sûr nous ne sommes pas de ceux qui repeignent l’Europe en rose pour vendre du rêve aux travailleurs. Le but de ces gens-là, c’est de tenter de faire oublier qu’ici, en France, là où ils ont été, sont ou seront au gouvernement, ils n’ont que de la sueur et des larmes à proposer au monde du travail.

Mais jamais nous ne défendrons non plus les grossièretés nationalistes de ceux qui prétendent que l’Europe est une catastrophe, que les frontières nationales sont une protection pour les exploités, et qui pleurnichent sur « l’indépendance perdue » de la France ou qui gémissent sur le fait qu’avec l’euro, la France aurait perdu son « indépendance monétaire » au profit de la BCE ! 

Rappelons leur qu’avant, au temps béni du « franc », c’était la Banque de France qui fixait la politique monétaire, et que pendant longtemps le conseil d’administration de la Banque de France a été directement composé des 200 plus gros capitalistes du pays. 

Alors, si l’indépendance nationale signifie la soumission aux décisions des 200 familles les plus riches de France, nous la laissons bien volontiers à ceux à qui cela plaît, MAIS, nous, nous continuerons de revendiquer fièrement notre internationalisme, à dire haut et fort que nous pensons que notre principal ennemi est dans notre propre pays, et qu’il a pour nom : la grande bourgeoisie française !

Oui, d’un bout à l’autre de l’Europe, les travailleurs sont soumis aux mêmes fléaux : le chômage et l’exploitation. 

À l’échelle de l’Union européenne, il y avait au 1er janvier dernier 16,2 millions de travailleurs au chômage. 16,2 millions ! C’est le nombre d’habitants cumulé du Danemark, de la Finlande et de l’Irlande. C’est comme si ces trois pays avaient été complètement dévastés et toute leur population écartée de toute activité de production.

Voilà ce que la dictature du grand capital impose, dans une des régions les plus riches du monde. Plus de 16 millions de femmes et d’hommes valides, dotés de bras, de mains, de cerveaux, qui pourraient mettre leurs capacités au service de la collectivité par leur travail, mais qu’on a jetés par-dessus bord, et qu’on laisse se noyer avec, au mieux, quelques aides sociales là où cela existe. Ce seul fait devrait suffire à condamner, irrémédiablement, le capitalisme.

Mais en plus, pendant que ces millions de travailleurs crèvent au chômage, des dizaines de millions d’autres, de leur côté, s’esquintent au travail, avec des cadences de plus en plus folles, pour des salaires de plus en plus dérisoires. C’est vrai, je l’ai dit, d’une région à l’autre de l’Europe et dans les deux sens : les capitalistes ferment des usines dans les pays les plus riches d’Europe pour les rouvrir dans ceux où les salaires sont les plus bas. 

Mais ils ont aussi réussi à importer la main-d’œuvre qu’ils appellent « à bas coût » dans les pays les plus riches, par exemple à travers le système des travailleurs détachés qui date de 1996 : des ouvriers, des chauffeurs, des employés venus de Pologne ou de Roumanie sont employés en France, aujourd’hui, aux conditions sociales de leur pays d’origine, c’est-à-dire avec des salaires qui peuvent être jusqu’à deux fois inférieurs aux salaires les plus bas de ce pays. 

C’est une infamie, mais cela n’a rien de nouveau : le capitalisme ne fait ici que refaire ce qu’il fait depuis toujours. 

Sous le préfet Haussman, au XIXe siècle, Paris a été reconstruit par des ouvriers venus de Bretagne ou du Berry parce qu’ils coûtaient moins cher que les ouvriers parisiens ; tout au long du XXe siècle, les usines françaises ont tourné en surexploitant les ouvriers venus des colonies ou ex-colonies françaises d’Afrique ou du Maghreb ; et aujourd’hui, la directive « travailleurs détachés » permet de faire de même avec les travailleurs européens. 

Il est donc stupide d’incriminer l’Europe sur ce terrain : c’est toute l’organisation sociale capitaliste qui fonctionne comme cela, en faisant jouer la concurrence entre les travailleurs… et ce n’est pas en sortant de l’Europe qu’on en finira avec ces pratiques : c’est en sortant du capitalisme.

Mais pour les grands patrons, il n’y a même pas besoin d’aller chercher des travailleurs à l’autre bout de l’Europe pour leur faire accepter, par mille moyens, une exploitation toujours accrue : y compris ici en France, la pression du chômage, la peur de perdre son travail et de n’avoir plus les moyens de nourrir les siens, suffit à faire accepter aux travailleurs des salaires en baisse, des heures supplémentaires non payées, une dégradation permanente de leurs conditions de travail et de vie. 

Dans le groupe PSA où je travaille, nous côtoyons chaque jour des travailleurs handicapés qui acceptent des postes non aménagés, bien trop durs pour leur état physique, et qui serrent les dents par crainte d’être reconnus inaptes et licenciés. 

Le chômage est bien un cancer pour la société : un cancer parce qu’il condamne à la mort sociale des millions de travailleurs ; et un cancer parce qu’il s’étend à tout l’organisme social en exerçant une pression permanente sur tous ceux qui travaillent. Et parce que la misère, la démoralisation, la désespérance qu’il provoque conduisent immanquablement à une montée de l’individualisme, du chacun pour soi, de la violence, de la délinquance qui pourrit la vie des quartiers populaires. 

Le chômage est une catastrophe qui touche les travailleurs sans emploi comme les travailleurs en activité, qui détruit peu à peu des régions entières, et que toute la collectivité paye d’une façon ou d’une autre. 

Les politiciens bourgeois s’accordent tous à prétendre que vaincre le chômage serait sinon impossible, du moins si difficile, que cela prendrait des années ou des décennies. Et les porte-parole du Medef, eux, n’hésitent plus à dire que si l’on veut en finir avec le chômage de masse, il n’y a qu’à se montrer aussi « compétitifs » que d’autres pays – autrement dit que si le smic était en France de 286 euros brut par mois, comme en Bulgarie, les patrons consentiraient peut-être à embaucher. 

Mais qu’est-ce que c’est que cette société dans laquelle nous n’avons le choix qu’entre nous accommoder d’un chômage endémique ou accepter de voir nos conditions de travail et de vie ramenées au XIXe siècle ? 

Eh bien, nous refusons ce choix ! Et nous affirmons que oui, il serait possible non seulement que chacun ait un emploi, mais aussi un salaire qui permette de vivre dignement. Les moyens existent pour cela, et il faudra aller les chercher là où ils sont : dans les coffres-forts de la grande bourgeoisie !

Affirmer cela, c’est la raison d’être de notre candidature à ces élections, comme à toutes les élections. Face à tous les mensonges, face à tous ceux qui prônent la résignation ou l’adaptation aux conditions dictées par les patrons, nous voulons défendre un programme de luttes, des mesures d’urgence que les travailleurs devront imposer par leurs mobilisations – parce que ce serait le seul, l’unique moyen d’enrayer la dégradation de nos conditions de vie. 

Les travailleurs n’ont aucune raison d’accepter le chômage et les bas salaires. Ce que les politiciens bourgeois ne disent jamais, c’est qu’en réalité la résorption complète du chômage, c’est un problème simple ! Un problème qui pourrait être réglé presque du jour au lendemain avec deux mesures évidentes, de simple bon sens, deux mesures qui iraient dans le sens de l’intérêt général de la collectivité : imposer, de force, l’interdiction des licenciements et la répartition du travail entre tous, sans perte de salaire – c’est-à-dire non seulement empêcher les patrons de licencier, mais les obliger à embaucher les chômeurs !

Cela coûterait de l’argent à la bourgeoise ? Oui ! Et alors ? La résorption du chômage ferait économiser des milliards à la collectivité, elle permettrait à tous de vivre mieux, elle résoudrait bien des fléaux sociaux… Et c’est cela qui devrait compter, si le monde ne marchait pas sur la tête. 

Mais sous le capitalisme, parce que c’est le profit qui gouverne le monde, il est considéré comme normal que toute la société paye, que toute la société se dégrade, que toute la société se délite, uniquement pour que la grande bourgeoisie continue de gagner de l’argent. Normal que l’ensemble de la collectivité, des hommes et des femmes qui la composent, fonctionne comme une gigantesque pompe à fric qui ne marche que dans un seul sens : vers les comptes en banque du grand patronat.

Eh bien l’un de nos objectifs, dans cette campagne, c’est justement de dénoncer ce système, de dire – et nous sommes les seuls à le dire – que le problème n’est pas la répartition des richesses, ce n’est pas de prendre un peu aux uns pour donner aux autres : le problème central, c’est de remettre en cause la domination politique, économique et sociale du grand capital sur l’ensemble de la société.

L’idéologie bourgeoise est capable de pénétrer tous les pores de la société, à travers les discours des hommes et des femmes politiques, des économistes, des éditorialistes – jusqu’à finalement paraître des vérités éternelles aux yeux même de la plupart des travailleurs. 

Regardez ce qui se passe à chaque fois que Nathalie ou moi-même, sur un plateau de télévision, expliquons qu’il suffirait de faire payer la bourgeoisie pour résoudre radicalement le fléau du chômage. C’est la même réaction, unanime, en face : chez les politiciens de droite comme de gauche, on lève les bras au ciel d’un air épouvanté en criant « Faire payer les riches ? Mais enfin, vous n’y pensez pas ! C’est impossible ! Et la compétitivité ? ». 

Eh bien si, nous y pensons. Nous y pensons même sans cesse quand nous voyons les ravages du chômage et de la pauvreté parmi les nôtres. Quand nous voyons à quel point la grande bourgeoisie croule littéralement sous le fric, au point de n’avoir plus la moindre idée de ce qu’elle pourrait en faire. 

L’incendie de la cathédrale Notre-Dame est évidemment un désastre pour tous ceux qui sont attachés aux merveilles que l’ingéniosité et les mains des travailleurs ont su créer au cours des siècles.

Mais cette catastrophe culturelle est-elle plus grave que le fait que près d’un million de personnes mangent aux Restos du cœur ? Est-elle plus grave que la mort de 566 SDF dans la rue l’an dernier ? Que les millions de gens qui ne se soignent plus, parfois ne se chauffent plus l’hiver par manque d’argent ? Est-elle plus grave que les usines qui ferment, que les travailleurs jetés à la rue sans perspective de retrouver jamais un emploi, est-elle plus grave que les conséquences de la véritable guerre sociale que mènent chaque jour les patrons de ce pays contre le monde du travail ?

Eh bien pour les grandes familles bourgeoises, il semble que oui, puisque ces gens, qui nous expliquent à longueur d’année, que remplacer un carreau cassé dans les usines va mettre en péril la compétitivité de l’entreprise, ont su trouver en un claquement de doigts un milliard d’euros pour Notre-Dame. 

On ne sait pas trop si c’est parce que les Pinault ou Bolloré sont notoirement des grenouilles de bénitiers, ou si c’est juste l’occasion d’un bon coup de pub pas si cher. Je n’exagère pas : le budget publicitaire du seul groupe LVMH de Bernard Arnault est d’environ 140 millions d’euros par an. 

Mais cette histoire a au moins un avantage : c’est que pour une fois, on les a vues sortir du bois, ces grandes familles bourgeoises d’habitude si discrètes. Celles dont personne ne parle, à part nous, Lutte ouvrière, qui répétons à longueur d’année qu’il faut faire payer le grand capital. Beaucoup nous demandent : mais qu’est-ce que c’est, la grande bourgeoisie ? Eh bien ! ce sont eux. Ce sont ces gens qui en 24 heures ont sorti de leur poche 100, 200 millions d’euros. Ce sont les Arnault, Pinaud, Bolloré, Bettencourt ! Un milliard en 48 h ! 

Un milliard d’euros, pour vous donner un ordre d’idée, c’est la somme nécessaire pour payer, pendant un an, un salaire de 1 800 euros par mois cotisations comprises à 11 500 travailleurs !

Alors oui, l’argent, l’argent nécessaire pour vaincre le chômage, il est là.

Lors de notre dernière réunion publique, ici même, j’ai raconté que Bernard Arnault, en 2018, avait gagné le smic toutes les 20 secondes, trois smic à la minute. Eh bien camarades … Depuis les choses ont changé. Parce que ce chiffre que je donnais, c’était celui du mois de mars. Mais figurez-vous qu’entre mars et avril, Monsieur Arnault a fait quelques bonnes opérations spéculatives, et qu’en un mois, sa fortune a augmenté de … 10 milliards d’euros. 

Vous avez bien entendu ? En un mois ! Cela veut dire que pendant cette période, la fortune d’Arnault a augmenté de 13,7 millions d’euros chaque heure, soit… 3 smic à chaque seconde. 

Alors, vous pensez bien que ses 200 millions pour les bonnes œuvres, c’est une aumône : ça représente moins que ce qu’il a gagné en une seule journée.

Alors oui, c’est bien à cette grande bourgeoisie de payer pour résorber le chômage. C’est à elle d’assurer des salaires corrects c’est-à-dire au moins 1 800 € net par mois, le minium nécessaire pour vivre. D’abord tout simplement parce qu’elle en a 1000 fois les moyens. 

Et ensuite pour une raison encore plus évidente : c’est qu’elle en est, à 100 %, responsable. Ce sont eux qui dirigent la société. Ce sont eux qui prennent les décisions économiques. Ce sont eux qui sont aux commandes – ils nous le répètent assez, tous ces bourgeois qui ne cessent de rabâcher que leurs revenus faramineux se justifient par les risques qu’ils prennent à diriger la société. 

Alors puisque ce sont eux qui dirigent, et bien qu’ils payent les dégâts provoqués par leurs agissements !

Et pourtant, s’il y a une chose qui revient en boucle dans les discours des politiciens et des experts de tout poil, c’est que la résorption du chômage ne doit, surtout pas coûter un centime aux capitalistes ! Que l’État paye ! que les travailleurs payent ! que les associations se débrouillent à faire la quête pour nourrir les chômeurs en fin de droit ! 

Mais eux, les riches ? les seuls et uniques responsables, ne devraient jamais avoir à mettre la main à la poche ? Il serait normal que les ouvriers, leurs familles, leurs enfants, soient la variable d’ajustement de la société capitaliste, qu’on puisse les prendre et les jeter quand cela arrange les bourgeois, que l’on puisse gâcher des millions de vies, broyer des millions de familles ouvrières, uniquement pour présenter un bilan comptable qui plaira aux actionnaires et à la Bourse ? 

Eh bien nous, nous ne le pensons pas. Nous affirmons qu’il faut faire payer les riches en imposant l’interdiction des licenciements et la répartition du travail entre tous, qu’il faut imposer des augmentations massives des salaires, des pensions et des allocations, parce qu’il n’est pas possible de vivre aujourd’hui avec moins de 1 800 euros par mois ! Et ces salaires, pensions et allocations devront, nécessairement, être indexées sur la hausse réelle des prix, parce que nous n’avons aucune raison d’accepter que les hausses de salaires soient dévorées par l’inflation.

Et nous affirmons que ce ne sera qu’un début surtout, parce que les travailleurs devront faire en sorte, tôt ou tard, de retirer définitivement à la grande bourgeoisie ses moyens de nuire à toute la société, en lui disputant directement le pouvoir !

Et la première étape, pour disputer le pouvoir aux capitalistes, ce sera d’imposer le contrôle de la population sur leurs agissements. Un tel contrôle sera indispensable ne serait-ce que pour rendre effectif ce que je viens d’évoquer, c’est-à-dire l’indexation des salaires et des pensions sur la hausse des prix. 

Mais la lutte contre le chômage supposerait aussi de contrôler ce que font les capitalistes, et pourquoi ils le font. 

Lorsque l’on apprend qu’une entreprise multimilliardaire comme Auchan, avec à sa tête la 5e fortune du pays, la famille Mulliez et ses 38 milliards d’euros vient d’annoncer la vente de 21 hypermarchés, menaçant l’emploi de plus de 800 salariés, on mesure la nécessité d’un contrôle des travailleurs sur les décisions de ces gens-là. Parce que seul un tel contrôle permettrait de lever le voile sur les vraies raisons de leurs décisions, permettrait de révéler combien d’argent il y a et où il se cache, permettrait de montrer combien d’argent les Mulliez gagnent sur le dos de chaque caissière, chaque manutentionnaire qu’ils exploitent, chaque petit fournisseur qu’ils grugent !

Cette nécessité du contrôle – du contrôle ouvrier – nous la défendons pendant cette campagne, comme nous le faisons depuis des années – et comme le mouvement communiste révolutionnaire le fait depuis toujours. 

Si cette idée est fondamentale, c’est parce qu’elle repose sur le fait que nous, les travailleurs, nous sommes la source de toute la production de richesses, nous sommes ceux qui faisons, tout fonctionner. Autrement dit, nous sommes les seuls qui pouvons collectivement exercer ce contrôle, parce que nous occupons déjà tous les postes stratégiques de la société capitaliste : l’élaboration des marchandises, leur production, leur transport, leur distribution, c’est nous qui les réalisons. La comptabilité des entreprises, c’est nous qui la faisons. La circulation des richesses, c’est nous qui l’assurons. Les réseaux qui permettent la production, les échanges, même les transferts de capitaux, ils sont déjà entre nos mains. Non parce que nous les possédons, mais parce que nous les construisons, nous les contrôlons, nous les faisons fonctionner, nous les entretenons.

En Mai 68, une affiche célèbre disait : « Le patron a besoin de toi, tu n’as pas besoin de lui ». C’est la même idée, et c’est une idée qui ne date pas d’hier, elle date des débuts même du mouvement ouvrier organisé. 

C’est la conscience, qu’il faudra retrouver, de la place centrale qu’occupe le prolétariat dans la production et l’organisation capitalistes. L’idée que quand la classe ouvrière reprendra conscience de sa force et décidera de s’en servir, elle sera capable d’ôter toute capacité d’agir à la grande bourgeoisie, pourtant si puissante aujourd’hui. 

La bourgeoisie, ses hommes politiques et son appareil d’État dominent la société, mais c’est uniquement parce qu’il y a des millions d’hommes et de femmes payés une misère qui le permettent ! 

Mais un jour viendra où non seulement les ouvriers ne voudront plus faire tourner la pompe à profit dans les usines, mais où les bourgeois ne trouveront plus un chauffeur routier ou un cheminot pour transporter leurs richesses, plus un opérateur de réseau pour faire passer leurs communications téléphoniques, plus une secrétaire pour taper leurs courriers, plus un travailleur pour alimenter leurs limousines et leurs jets en carburant, plus un employé pour virer leurs capitaux d’un compte à un autre, même plus un domestique pour leur préparer à manger ! 

C’est à ce moment-là, en l’expérimentant, que le prolétariat mesurera sa force et comprendra que s’il est déjà capable de faire tourner toute la société, il est aussi, armé de sa conscience, capable de la diriger !

Ces idées, nous les défendons ici en France, mais elles devront être défendues partout. Parce que l’Europe et le monde, pour nous, sont constitués d’une seule et même classe ouvrière, qui a partout les mêmes intérêts, partout la même place, et aura partout la même force quand elle renouera avec la conscience.

Nous les entendons chaque jour, les empoisonneurs de la conscience ouvrière qui répètent que nous devons nous méfier des travailleurs de Moldavie ou de Roumanie, que notre ennemi est le travailleur détaché de Pologne ou de Bulgarie… Ceux qui, comme Jean-Luc Mélenchon lui-même lors d’un discours en juillet 2016, prétendent que « chaque fois qu’arrive un travailleur détaché, il vole le pain aux travailleurs qui se trouvent sur place ». 

Et bien face à ces insanités, nous ne cesserons jamais de chercher à répandre dans la conscience ouvrière qu’aucun travailleur que la misère oblige à changer de région pour chercher du travail ne peut être traité de voleur, car les seuls voleurs, ce sont les parasites capitalistes qui se nourrissent et s’enrichissent du travail des autres ! 

Comme tous les ouvriers de l’automobile, je travaille dans une usine où coexistent des dizaines de nationalités différentes. À PSA Poissy, il y a bien plus de nationalités qu’il n’y a de pays dans toute l’Union européenne. 

Et au-delà des différences de culture et de langue, nous connaissons tous le même sort quand la sonnerie retentit à 5 h 20 du matin et que la chaîne commence à avancer. Tous, le même épuisement lorsque la journée se termine et qu’un patron nous a obligés à passer sept heures, et parfois plus, à refaire 1000 fois le même geste. Tous, les mêmes douleurs dans les articulations et dans les muscles parce que les cadences sont toujours plus dures. 

Et ce que les ouvriers partagent au sein de cette usine, des milliers d’autres le partagent d’un bout à l’autre du continent : parce que PSA, pour rationnaliser sa production, a un seul et unique modèle d’usine de montage, que ce soit à Poissy, à Rennes, à Sochaux, à Trnva en Slovaquie ou à Kolyn en République tchèque. Même plan, même organisation, mêmes machines, n’importe quel ouvrier de n’importe laquelle de ces usines pourrait être transporté dans une autre pour y faire les yeux fermés le même travail sans changer un geste. 

 Oui, dans les usines, les chantiers, les bureaux de toute l’Europe, il n’y a qu’une seule classe ouvrière, une masse immense de travailleurs qui produisent tout pour la même économie, qui sont exploités par les mêmes capitalistes, qui connaissent tous la même peur du chômage et les mêmes problèmes de fin de mois difficiles, ou impossibles. 

Et dans cette Europe, comme partout ailleurs, les seuls étrangers ce sont les étrangers au monde du travail, c’est-à-dire les exploiteurs. 

Ce qui fait la différence entre les hommes, ce n’est pas la langue, la culture ou le pays dans lequel le hasard les a faits naître. C’est le compte en banque. 

Les frontières, pour nous, ne sont pas géographiques, ce sont des frontières de classe, la frontière politique et sociale qui sépare ceux qui vivent de leur travail et ceux qui vivent du travail des autres. 

Dans un des poèmes de Jacques Prévert, La Crosse en l’air, un travailleur parisien, veilleur de nuit, part à Rome et y rencontre un autre travailleur et Prévert écrit : « Un Italien qui n’a pas de travail, un Romain, un Romain qui crève la faim. Le Romain fait des gestes avec les mains. Ces gestes, le veilleur de nuit les comprend : ce sont des gestes pareils aux siens. Un pour serrer la ceinture, un pour montrer les devantures, un autre geste avec la main à plat au-dessus du pavé, ça veut dire qu’on a des enfants, c’est un Romain qui a trois enfants – et pas de travail. Ils se comprennent avec très peu de mots, le Romain et le Parisien ».

Eh bien camarades, nous sommes bien certains qu’un jour viendra où « avec très peu de mots », les travailleurs de France et ceux d’Europe recommenceront à se comprendre aussi, parce qu’ils se mettront à parler ensemble le langage de la lutte des classes – le langage du prolétariat. Qu’à l’inverse de tous les préjugés nationalistes, racistes, protectionnistes, renaîtra un jour la conscience qui permettra à tous les prolétaires de comprendre que d’où qu’ils viennent, où qu’ils vivent, où qu’ils se fassent exploiter, ils sont des frères de classe, qui tous ensemble lèveront un jour le drapeau de la révolte sociale, avec inscrit dessus en français, en allemand, en polonais, en italien ou en hongrois : Prolétaires de tous les pays, unissons-nous ! 

Discours de Nathalie Arthaud

Défendre une politique pour les luttes des travailleurs

Contrairement à tous les autres partis qui rivalisent dans les élections pour accéder aux affaires et « gouverner » dans le cadre de cet ordre social, nous affirmons que les travailleurs ne changeront pas leur sort par les élections. Ils le changeront par leurs luttes collectives contre la classe capitaliste et ses représentants politiques.

Les élections n’ont jamais changé le sort des travailleurs parce que la condition d’exploité ne dépend pas des gouvernements ni des lois qu’ils peuvent faire ou défaire. Le fait d’être pauvre ou riche, d’appartenir à la classe ouvrière ou à la bourgeoisie n’est inscrit nulle part.

Aucune loi n’impose l’exploitation ni ne force les travailleurs à se faire voler le fruit de leur labeur. Mais quand on ne possède pas de capitaux, on n’a pas le choix. La seule façon de vivre dans cette société, c’est de vendre sa force de travail pour enrichir celui qui détient les capitaux.

Derrière les grands mots dont on nous berce, la liberté, l’égalité, la démocratie il y a cette réalité sociale. La réalité de cette injustice fondamentale qui divise la société en deux classes sociales aux intérêts opposés. La réalité de la lutte de classe. Cette lutte est menée par la classe ouvrière depuis que le capitalisme est né et elle se poursuivra jusqu’à son renversement par les travailleurs.

Faut-il pour autant déserter le terrain électoral ? Faut-il que les révolutionnaires que nous sommes se retirent du combat politique, laissent les partis bourgeois occuper le terrain et les consciences ouvrières ? Sûrement pas ! En appeler aux mobilisations, aux grèves ou aux manifestations ne suffit pas. Il faut aussi que les travailleurs en lutte aient une politique, qu’ils sachent où aller, pourquoi se battre, comment.

Les élections et le vote ne peuvent pas être un but en soi pour les travailleurs. Mais ils offrent la possibilité de se regrouper derrière un programme et une politique. Ils offrent la possibilité de se réunir dans un camp politique opposé à la bourgeoisie et à tous les beni oui-oui du capitalisme.

Proposer une politique susceptible d’aider les travailleurs à se battre pour leurs intérêts avec la conscience qu’il faudra tôt ou tard renverser la classe capitaliste est notre raison d’être. C’est ce pourquoi nous militons en permanence.

C’est avec cette perspective que nous avons pris le parti du mouvement des gilets jaunes. Nous sommes allés discuter sur certains ronds-points et dans des manifestations pour y défendre notre politique : dépasser le mot d’ordre de « Macron démission » et mettre en cause le grand patronat.

Et surtout, nous avons continué de militer dans les entreprises où nous travaillons, pour que les salariés qui ont les moyens autrement plus efficaces que les gilets jaunes de s’affronter à la bourgeoisie se lancent dans le combat.

Alors cette campagne électorale prolonge et amplifie notre militantisme quotidien. Elle doit servir à populariser des réponses aux multitudes questions politiques que les travailleurs se sont posées dans le cadre de cette mobilisation. Comment imposer une hausse du pouvoir d’achat ? Comment lutter contre les injustices sociales ? Comment peser sur le pouvoir ?

Et si nous parvenons à semer dans les consciences ouvrières les objectifs de lutte que Jean-Pierre a exposés, si demain, plus de travailleurs sont conscients du combat à mener, nous aurons réussi notre campagne !

Qu’est-ce qu’une politique révolutionnaire ?

Un certain nombre de gilets jaunes sont convaincus de s’être fait entendre grâce à leurs manifestations indomptables et aux vitrines brisées sur les Champs-Elysées. Les manifestations qui se sont transformées en scène d’émeutes ont sans doute accentué la pression sur Macron. 

Mais ce n’est pas l’essentiel. Macron a reculé parce que le mouvement attirait l’immense sympathie des classes populaires et des travailleurs et parce que, comme le grand patronat, il avait des raisons de craindre que la contestation se généralise.

Quant à dire que les gilets jaunes ont obtenu en cinq mois ce que des années de luttes ouvrières n’ont pas réussi à arracher, c’est une illusion d’optique. Car il ne s’agit pas du même combat.

Les ouvriers qui se battent pour sauver leur emploi combattent la politique de la bourgeoisie. Les cheminots qui se sont battus contre la réforme ferroviaire remettaient en cause les intérêts du grand capital. Les gilets jaunes ne se sont pas lancés dans ce combat-là. Ils ont forcé Macron à changer l’enrobage de sa politique anti ouvrière mais la grande bourgeoisie n’a rien cédé !

Ceci dit, l’idée que seule l’action violente peut faire bouger les choses fait son chemin. C’est la stratégie des Black blocs que l’on voit à l’œuvre depuis déjà plusieurs années, qui consiste à s’affronter avec la police et de s’en prendre aux symboles du capitalisme.

Et parmi ceux qui ne supportent plus la situation, qui sont révoltés par la brutalité de la répression, les gaz lacrymogènes, les charges, les tirs de balles de défense et les coups de matraques, cette stratégie a un certain succès. Eh bien ce n’est pas la nôtre !

Nous ne sommes pas de ceux qui hurlent avec les loups quand le Fouquet’s brûle sur les champs Elysées. Cette violence, très relative d’ailleurs, est le retour de flamme de la violence générée par une société injuste de plus en plus dure et inhumaine pour les plus pauvres.

Mais nous dénonçons la stratégie des Black blocs parce que cela ne peut pas être une politique pour les travailleurs. Les Blacks blocs prétendent avoir une politique insurrectionnelle et révolutionnaire. Mais la révolution ne se fera pas en brûlant quelques agences bancaires ni en se défoulant de temps en temps sur les CRS.

Le mot révolution a un sens pour nous, communistes révolutionnaires. Il signifie de renverser le pouvoir de la bourgeoisie et de l’exproprier pour lui enlever son monopole sur la direction de la société.

Pour nous, la révolution c’est que les travailleurs prennent le pouvoir politique et le pouvoir économique, c’est-à-dire qu’ils prennent le contrôle des citadelles que sont les grands groupes capitalistes. De petits groupes, même décidés et courageux, sont incapables de le faire. Seule la grande masse consciente des exploités peut y parvenir.

Nous écrivons sur nos banderoles que « l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ». Ce n’est pas que pour décorer nos salles. C’est une politique, la seule réellement révolutionnaire. Car faire la révolution ce n’est pas détruire, c’est bâtir une autre société et cela ne peut se faire qu’avec la participation active et consciente du plus grand nombre.

Il n’y aura pas de sauveur suprême pour les travailleurs ni dans les urnes, ni dans la rue. Quand ils se battent collectivement, les travailleurs n’ont pas besoin d’un Zorro. Au contraire, leur conscience et leur lutte iront d’autant plus loin qu’ils prendront confiance dans leurs propres forces en discutant, en décidant ensemble, en dirigeant eux-mêmes leurs propres combats.

Dans un système qui apprend aux exploités à baisser la tête et les habitue à subir, oser contester et manifester pour défendre ses intérêts, c’est toujours commencer à relever la tête. Faire grève est toujours une victoire d’abord sur soi-même, sur la routine, sur la résignation. Mais même voter pour le camp des exploités contre le camp dominant, c’est déjà s’affirmer.

Eh bien il faut profiter de toutes les occasions qui se présentent, les manifestations, les grèves, l’organisation à la base dans les syndicats pour élever la conscience de classe. Et y compris les élections !

La force de frappe des exploités est dans leur nombre mais leur arme essentielle sera leur conscience politique. Alors toutes les prises de conscience, y compris les plus invisibles compteront !

La classe capitaliste est parasitaire, elle nous mène à la catastrophe, il faut la renverser !

La transition écologique

Dans ces élections européennes, la transition écologique est mise en avant par tous les candidats. Beaucoup en viennent à dire qu’il faut « repenser l’économie », qu’il faut remettre à plat toute l’organisation économique, la façon de produire notre énergie, de fabriquer, de se déplacer, de consommer… Dans ses envolées lyriques, un Nicolas Hulot peut aussi affirmer qu’il faut mettre fin au système.

Mais cela ne signifie jamais poser la question centrale, la question essentielle : allons-nous oui ou non laisser les manettes de l’économie dans les mains d’une minorité capitaliste qui ne jure que par ses profits, ses dividendes, ses retraites chapeaux et ses cours boursiers ?

Pour sauver l’environnement et la planète, ils proposent presque tous des plans d’investissements. Les uns parlent de 500 milliards, les autres de 1000 milliards sur 5 ans… Mais ce sont encore et toujours des plans d’aides aux capitalistes, des plans destinés à inciter les grands groupes industriels et financiers à s’orienter dans de nouvelles filières.

De fait, ils proposent tous de faire dépendre l’avenir de l’humanité et de la planète de ces mêmes capitalistes qui tuent la planète à petit feu depuis qu’ils dominent toute vie économique et sociale !

Car qui exploite depuis deux siècles les gisements de charbon et de pétrole en ravageant des régions entières, en polluant les sols, les fleuves, les nappes phréatiques et en empoisonnant les populations riveraines ?

Qui a mis pendant des décennies du plomb dans l’essence, malgré sa toxicité ? Qui a truqué les moteurs des voitures pour contourner les contrôles anti-pollution ? Qui a transformé en déserts des millions de kilomètres carrés de terres agricoles en les surexploitant et en les chargeant d’intrants chimiques ?

Qui envoie en Afrique ou en Asie ses déchets industriels, cancérigènes, radioactifs ou en plastique non recyclable pour économiser le coût du retraitement ? La réponse est toujours la même : ce sont les capitalistes !

Et il faudrait confier la transition écologique à ces irresponsables qui empoisonnent et réchauffent la planète ? A ces irresponsables dont le mode de production est en train de provoquer une nouvelle extinction des espèces vivantes ?

Eh bien, contrairement à tous ces candidats, nous ne confierons jamais notre avenir et celui de la planète à la bourgeoisie !

Nous ne devons faire aucune confiance à la bourgeoisie. C’est la raison pour laquelle il faut rejeter le protectionnisme. Dans cette campagne, le protectionnisme est mis à des sauces diverses et variées, les uns le veulent solidaires, les autres intelligents. Les uns le veulent aux frontières nationales, les autres, aux frontières européennes.

Mais l’idée est la même : c’est de taxer les produits aux frontières, de les rendre plus chers pour aider les entreprises françaises à être plus compétitives et créer des emplois.

On en revient toujours à la même politique. Taxer les consommateurs, taxer les petites gens, taxer tous ceux qui précisément sont forcés d’aller au moins cher parce qu’ils sont mal payés ou parce qu’ils ont une petite retraite. Tout ça pourquoi ? Pour assurer des marchés protégés aux capitalistes ! Pour aider les capitalistes !

Et qu’est-ce que les capitalistes feront de ces marchés protégés ? Des havres pour l’emploi et pour les travailleurs ? Des marchés où les consommateurs pourront trouver de quoi se satisfaire avec des produits sains et de qualité ?

Des marchés protégés il y en a déjà. Prenez la grande distribution. Voilà une activité locale. Les grandes surfaces sont-elles moins rapaces ? Sont-elles soucieuses des conditions de travail de ses salariés, versent-elles de meilleurs salaires ? Embauchent-elles ? Rémunèrent-elles les petits producteurs « au juste prix » ?

Quant à prétendre que les produits bien de chez nous sont forcément plus écologiques et respectueux des droits des travailleurs que ceux provenant de l’étranger, c’est avoir la mémoire courte. Parce qu’il faut se souvenir de l’amiante ; du Mediator ; des prothèses PIP… les capitalistes bien de chez nous ont déjà empoisonné de mille et une façons et recommenceront demain pour leurs profits et leurs sinécures.

La politique protectionniste est une politique pour la bourgeoisie, pour ses affaires. C’est une politique qui nous fait dépendre encore et toujours de ses quatre volontés. Et encore une fois, il n’y a que des coups à attendre de ces gens-là.

On peut leur dérouler le tapis rouge, leur promettre tous les marchés protégés possibles et imaginables, ils écraseront les travailleurs tant qu’ils le pourront comme ils se moqueront de l’environnement. Renforcer des frontières n’obligera aucun groupe industriel et financier à embaucher, augmenter les salaires et respecter les conditions de travail et de vie des salariés.

Les travailleurs ne se protégeront pas s’ils ne savent pas contre qui ils doivent se battre. Les travailleurs ont à se protéger de leurs exploiteurs ! Ils ont à se protéger de la rapacité des grands groupes ! Ils ont à se protéger d’un système basé sur l’irresponsabilité et la loi du profit !

Investissements et crise

La bourgeoisie est dépositaire des possibilités immenses créées par l’humanité et elle les gâche. Le pire de ce qu’elle nous coûte n’est pas dans l’accaparement des richesses, mais dans ce gaspillage.

Tous les politiciens accordent à la bourgeoisie la qualité d’investisseur parce qu’elle est assise sur une montagne d’or. C’est à ce titre que les actionnaires empochent les bénéfices et monopolisent le pouvoir dans les grands groupes. Ils ne méritent pas cet honneur. Parce qu’à moins de profits rapides et assurés, ils ne veulent pas investir !

Leurs « investissements », ce sont le plus souvent des rachats d’entreprises déjà existantes. Bayer par exemple a mis 54 milliards de dollars sur la table pour racheter Monsanto sans que la moindre richesse nouvelle ne soit créée. Prendre la gestion des autoroutes ou des Aéroports de Paris, ça oui, ça les intéresse. Car cet investissement-là consiste à racheter à bon prix des infrastructures, construites avec de l’argent public, pour les transformer en tiroirs caisse !

Mais investir pour résoudre la crise du logement, cela ne les intéresse pas. Il manque un million de logements à des prix abordables. C’est un secteur protégé de la concurrence, du tout cuit pour les Bouygues, pour les Vinci et autres marchands de béton. Mais ce n’est pas assez rentable à leur goût et ils préfèrent se lancer dans des partenariats public-privé juteux, ou dans la construction de tours de bureaux de 800 mètres de haut à Dubaï…

L’Etat leur livre pourtant tout sur un plateau : les salariés, les chercheurs, les infrastructures… ils sont arrosés d’argent public, le CICE, le crédit d’impôt recherche… Et quand ils font de mauvaises affaires, ils peuvent toujours compter sur l’aide de l’Etat. Mais les grandes familles qui monopolisent les capitaux se moquent bien de reprendre les usines, de produire des choses utiles ou de garantir les emplois.

D’ailleurs qu’est-ce qui pousserait les possesseurs de capitaux à investir dans la production utile, quand la finance et la spéculation rapportent 100 fois, 1000 fois plus ? Alors si on compte sur la bourgeoisie pour investir, créer des emplois, faire la transition écologique… cela prendra des siècles comme pour l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, et ce sera trop tard !

Si tant est que tout ne saute pas dans une nouvelle crise financière ! Parce que tous les experts financiers sont unanimes, nous courons tout droit vers un nouveau krach. La charge explosive est encore plus grande qu’en 2008 et nul doute que les ravages seront plus dévastateurs. Alors ce qu’il faut mettre à l’ordre du jour, c’est le renversement de cette classe de parasites par les travailleurs.

Les travailleurs qui sont les seuls à « investir » réellement dans les entreprises. Eux y investissent le meilleur d’eux-mêmes, ils consacrent à l’entreprise l’essentiel de leur temps, de leurs compétences et de leur énergie.

Ils sont forcés d’adapter leurs projets personnels et leur vie de famille en fonction de leur travail. Ils y investissent leur santé ! Tout ça pourquoi ? Pour enrichir des générations d’actionnaires, pour être traités comme des pions, ballotés d’actionnaires en actionnaires. Pour ne jamais avoir leur mot à dire et risquer d’être mis à la porte du jour au lendemain !

Eh bien lorsque qu’ils ne l’accepteront plus, ils prendront eux-mêmes les choses en main et prouveront qu’ils sont capables de diriger mille fois mieux l’économie que cette classe aveuglée par le profit !

L’Europe que le grand capital a construit n'est ni faite ni à faire

Même pour unifier l’Europe, on ne peut pas s’en remettre à la bourgeoisie. Même sur ce terrain qui correspondrait pourtant à ses intérêts généraux, elle s’est révélée incapable.

L’UE existe certes, mais elle n’a rien d’une véritable unification. C’est une Europe rabougrie, qui au bout de 60 ans, ne compte que 28 pays sur les 45 du continent. C’est une UE qui rejette toujours sa partie orientale, la Russie, l’Ukraine, la Biélorussie, une bonne partie des Balkans, sans parler de la Turquie. Et c’est une Europe qui est en train de se déliter comme on le voit avec le Brexit !

Et ne faut pas en être surpris. La construction européenne n’a été qu’une longue histoire de marchandages sordides entre bourgeoisies européennes pour disposer tout à la fois d’un marché élargi tout en continuant de disposer de tous les avantages d’un Etat national.

Le résultat de ces rivalités et de ces compromis est l’Union Européenne que l’on connaît : un mariage de raison où chacun fait chambre à part, défend son pré carré, ne met surtout pas son compte bancaire en commun et où n’importe quelle scène de ménage peut conduire au divorce !

Union européenne = paix ?

Mais, nous-dit-on, l’Union Européenne a au moins garanti la paix ! Eh bien ce n’est même pas vrai. Le continent européen lui-même a été déchiré par des guerres sanglantes, celle de l’ex- Yougoslavie au début des années 1990 et celle en Ukraine depuis 2014.

Les dirigeants européens se vantent d’être des forces de paix parce qu’au cours des dernières décennies, ils n’ont pas fait s’entretuer leurs propres peuples comme ils l’ont fait pendant les deux guerres mondiales. Mais ils font s’entretuer d’autres peuples dans le tiers monde.

Comme les États-Unis, la France et l’Allemagne sont des puissances impérialistes prêtes à tout pour sauvegarder leur influence et leurs intérêts aux quatre coins du monde. Quand un dictateur ne fait plus l’affaire, les dirigeants français, allemands et britanniques l’écartent et en installent un autre, y compris en s’engageant dans des guerres meurtrières.

Ils envoient leurs avions de combats aux quatre coins du monde, ils font sillonner les mers par leurs sous-marins nucléaires, les airs par leurs drones de combat et quand leurs intérêts sont en jeu, ils mettent des pays entiers à feu et à sang et soutiennent des milices plus barbares les unes que les autres.

Du Rwanda à la Syrie en passant par l’Irak ou la Libye des millions de femmes et d’hommes ont péri sous les coups de machettes ou sous les bombes. Des pays entiers ont été ravagés !

Tant que domine une poignée de capitalistes et tant que les rapports entre les peuples sont des relations de domination, de concurrence, de pillage, d’exploitation, il n’y aura pas, il ne peut pas y avoir ni de Paix ni d’Europe unie et fraternelle !

L’Europe forteresse : une ineptie infecte

Le plus détestable est qu’ils ont transformé l’Europe en forteresse. Et aujourd'hui quand Macron propose de relancer l’UE, c’est en révisant Schengen pour rendre cette forteresse imprenable en multipliant les garde-frontières, les barbelés, les murs.

Les mêmes qui avaient applaudi à la chute du mur de Berlin sont en train de reconstruire de nouveaux rideaux de fer ! Ils ont fait de la Méditerranée un cimetière marin ! Et cette politique est non seulement le fait des nationalistes comme Salvini en Italie, mais aussi de ceux qui, comme Macron, se prétendent progressistes !

Eh bien tous ces gens-là veulent faire tourner la roue de l’histoire à l’envers !

Nombre de politiciens aiment à rappeler les « racines chrétiennes de l’Europe ». Mais sans remonter plus loin, elles sont aussi gréco-romaines, c’est-à-dire une civilisation qui s’est épanouie autant au sud et à l’est qu’au nord de la méditerranée. Et les cathédrales d’Europe, comme Notre-Dame de Paris, n’auraient pas pu être bâties sans l’apport ne serait-ce qu’indirect des architectes arabes !

Quant à l’économie capitaliste, elle est mondialisée depuis toujours. Elle s’est même développée à partir du commerce international. A partir du commerce avec l’Afrique, avec l’Asie et le Moyen Orient, avec le commerce triangulaire et la traite esclavagiste aux 17 et 18e, qui ont été à la base de la révolution industrielle.

Puis il y a eu la colonisation qui a lié l’Europe et en particulier la France au Maghreb.

Parce que oui, quand les colonisateurs français sont allés pillés le Maghreb et l’Afrique drapeau bleu blanc rouge en tête, ils en ont créé des liens ! Dans l'oppression, dans le sang, dans l’exploitation. Que ce soit en créant des troupes d’indigènes dans les deux guerres mondiales, que ce soit en recrutant pour les mines de Lorraine, les usines automobiles ou dans le bâtiment.

Ces liens, ils sont là aujourd'hui. Des millions de femmes et d’hommes vivent avec de la famille d’un côté et de l’autre de la Méditerranée !

Et maintenant les dirigeants veulent transformer la Méditerranée en un mur infranchissable ! Eh bien ils n’y arriveront pas, mais l’idée, elle-même même est révoltante !

 

Aujourd'hui les échanges, les moyens de communications, les liens économiques, culturels, humains, entre les peuples n’ont jamais été aussi poussés. D’un bout à l’autre de l’Europe on rencontre les mêmes grands groupes, les mêmes enseignes, les mêmes grands capitaux.

Combien de réseaux, d’entreprises, de services, sont étroitement interconnectés, et ne fonctionnent que grâce à la coopération de millions de travailleurs qui, peut-être, ne parlent pas la même langue mais font ensemble une portion du même travail ?

Lorsque la France connaît un pic de consommation d’électricité, il est possible aujourd’hui d’en faire venir d’Espagne, d’Allemagne ou d’Italie. Chauffeurs routiers et cheminots parcourent 24 h sur 24 l’Europe dans tous les sens. Les travailleurs des banques sont connectés d’un pays à l’autre à chaque instant. Et une voiture dont le moteur peut être fabriqué en Slovaquie, la boite de vitesse en Grande-Bretagne et les pneus en Allemagne se trouve assemblée dans une usine de montage en France.

D’un côté les capitalistes ont construit des holdings et des trusts mondiaux qui amènent les travailleurs de tous les pays à communiquer et à coopérer. Ils poussent de gré ou de force, les travailleurs du monde entier à se fondre dans une seule et même grande classe ouvrière internationale.

Et leurs serviteurs politiques voudraient rendre les frontières hermétiques et présenter tout ce qui vient de l’étranger comme une menace ! Tous ces gens-là sont complètement dépassés par leur propre système. Ils sont devenus complètement réactionnaires !

Notre conception de l’Europe unie et fraternelle et notre rejet de l’UE du point de vue de l’unification de l’Europe

Alors pour ce qui est de l’Europe, notre perspective est celle d’une Europe véritablement unie et sans frontière. C’est celle d’une Europe fraternelle, une Europe de la coopération entre les peuples, ouverte sur le monde.

Nous sommes pour la disparition des barbelés, des murs, pour la disparition de tous ces drapeaux nationaux agités par les dirigeants pour jeter les peuples les uns contre les autres, que ce soit dans les guerres commerciales, que ce soient dans les guerres tout court.

Il y a un siècle déjà, en 1914, alors qu’éclatait la première guerre mondiale, Trotsky parlait ainsi des objectifs que le prolétariat devait se fixer : « Pour le prolétariat européen, il ne s’agit pas de défendre la « Patrie » nationaliste qui est le principal frein au progrès économique. Il s’agit de créer une patrie bien plus grande : les Républiques des États-Unis d’Europe, première étape sur la voie qui doit mener aux États-Unis du monde ».

C’est toujours une nécessité. Toute la réalité pousse dans ce sens. Et l’humanité n’a que trop tardé à la réaliser. Alors, tout en nous opposant aux institutions de l’Union européenne, comme à toutes les institutions de la bourgeoisie, nous avons la conviction que l’unification de l’Europe va dans le sens de l’histoire, qu’une véritable unification serait un progrès.

Pour le moment les 200 millions de prolétaires européens ne sont unis que par une même inquiétude devant les licenciements et le chômage. Lorsque l’inquiétude se transformera en combativité, la bourgeoisie européenne et l’ensemble du monde bourgeois pourront commencer à trembler !

A trembler comme au lendemain de la première guerre mondiale quand une vague de révolutions ouvrières partie de Russie a déferlé sur l’Europe.

A trembler comme lorsque le premier Etat ouvrier s’est s’adressé aux exploités d’Europe en mettant fin aux accords diplomatiques secrets et en développant toute une politique vis-à-vis des peuples opprimés pour établir avec des relations basées sur l’égalité et la fraternité.

Nos perspectives communistes de réorganisation de l’économie à l’échelle de la planète

La seule issue pour l’humanité est de renverser le capitalisme. C’est de renverser cette économie basée sur la recherche individuelle de profits et de la remplacer par une économie visant la satisfaction de tous. C’est d’en finir avec les lois aveugles de la concurrence et du marché et d’organiser, de planifier l’activité économique, de répartir le travail, les capitaux de façon à gérer les ressources de façon rationnelle, d’éviter les gaspillages et la pollution.

Pour y parvenir il faut exproprier la bourgeoisie des grands moyens de production et transformer les grandes banques, les groupes de l’industrie, de l’énergie, du bâtiment, des transports, les multinationales de la distribution et du numérique en propriété collective.

Entre les mains de la bourgeoisie, tout se transforme en instrument d’oppression. La robotisation, la numérisation et l’intelligence artificielle sont autant d’outils utilisés contre l’emploi et contre les exploités. Autant d’outils pour resserrer leur emprise sur la population.

Mais pensez à tout ce qu’il serait possible de faire si les travailleurs contrôlaient ces moyens fantastiques, pour soulager le travail, diminuer considérablement le temps de travail…

Ces immenses moyens de production, il ne faut pas le détruire, mais les maîtriser. Et il en va de même avec les liens économiques, sociaux et humains qui ont été tissés au travers de cette mondialisation. Ce sont des liens précieux, c’est la base sur laquelle un système plus performant que jamais s’est développé. Il faut que les travailleurs les reprennent à leur compte de sorte qu’ils servent à l’humanité toute entière.

Oui un tas de choses aujourd'hui inimaginables deviendraient possibles. Et changeraient réellement la face du monde ! On pourrait à nouveau mener de grands projets.

Dans un pays riche comme la France, les travailleurs pourraient s’adresser aux exploités du reste du monde et leur proposer bien des choses. Ils pourraient payer la dette de sang, de massacre et de pillage perpétrés par notre bourg impérialiste, ne serait-ce qu’en mettant à la disposition des travailleurs de ces pays la possibilité d’utiliser les moyens productifs qui sont ici.

Un temps, Borloo, qui cherchait sans doute une façon d’exister après avoir quitté le pouvoir, avait caressé le rêve d’électrifier l’Afrique. Pour cela il était parti en quête de 4 petits milliards par an sur 15 ans. Une somme dérisoire pour permettre à chaque village, chaque quartier, d’accéder à l’électricité avec tous les bouleversements que cela impliquerait pour 600 millions d’Africains privés d’électricité. Eh bien il n’a jamais réussi à les rassembler.

Pour mener à bien un tel projet, et bien d’autres encore, il faudra la révolution et que les travailleurs prennent le pouvoir !

Pourquoi la montée des idées populistes ?

Le Rassemblement national, les souverainistes et les xénophobes de tout poil ont le vent en poupe dans cette période de crise dans tous les pays d’Europe. Et il faut s’attendre à ce qu’ils fassent des scores élevés.

Nous sommes dans une période où, même s’il y a de la contestation sociale, le fatalisme continue de dominer dans les rangs des exploités. La conscience qu’il y a de l’argent dans la société existe. Lors de la surenchère des grandes fortunes pour Notre Dame de Paris, tout le monde l’a vu. Mais ce n’est pas pour autant que les travailleurs se sentent en mesure de contester à Pinault ou à Arnault le droit d’accaparer cet argent et de dominer du haut de leurs milliards.

Ce que vit l’écrasante majorité des classes populaires, c’est la misère, les bas salaires, le chômage et la précarité. C’est cette réalité où il faut se battre pour tout, pour un emploi, un logement, une place en crèche, un rdv chez un spécialiste, une place dans le bus ou le RER… Alors oui, cette réalité de la crise pousse les plus pauvres à se replier sur soi.

Et tous les démagogues s’en servent pour distiller leur poison. « On ne peut pas accueillir toute la misère du monde » est asséné de tous les côtés. Même quand Le Pen n’est pas là, on a du Le Pen !

Et oui il faut avoir une boussole politique pour rejeter ce discours qui est un discours de résignation. Car ceux qui nous rabâchent qu’« on ne peut pas accueillir toute la misère du monde », sont les mêmes qui prétendent qu’il est impossible d’embaucher, d’augmenter les salaires ou de sauver les retraites.

Ce sont ceux qui fabriquent la misère du monde. Ils la fabriquent dans les pays pauvres en poursuivant leur pillage. Ils la fabriquent ici en licenciant, en écrasant les salaires, en démolissant les services publics.

Le vote lepéniste est le produit du désarroi et de l’absence de perspectives des travailleurs. Mais d’où pourraient-elles venir si ce n’est d’un parti qui rejette tout l’ordre bourgeois ? D’un parti qui place sa confiance dans la capacité de la classe ouvrière de révolutionner la société ? et d’un parti qui se réfère à tout ce passé fait de révoltes, d’insurrections et de révolutions ouvrières !

Car ce passé existe, c’est un passé dont les travailleurs peuvent être fiers et qui leur ouvre des perspectives. La bourgeoisie a intérêt à l’ignorer ou à le déformer. Mais même les partis ouvriers que les travailleurs s’étaient construits lui ont tourné le dos depuis longtemps !

Eh bien c’est en reprenant le flambeau du mouvement ouvrier, en reprenant conscience de son rôle et de ses tâches que la classe ouvrière pourra devenir fière de ce qu’elle est et de ce qu’elle porte ; le but final de s’émanciper et de libérer toute la société du capitalisme.

Le rôle de la classe ouvrière et le parti

Seule la force collective des travailleurs recèle les capacités pour changer la société de fond en comble.

Dans cette dernière période marquée par le mouvement des gilets jaunes, la classe ouvrière ne s’est pas mobilisée en tant que telle. Mais si la mobilisation avait touché les grandes entreprises, si celles-ci avaient été arrêtées par la grève, c’est la fabrique du profit de la bourgeoisie qui se serait stoppée immédiatement. Et si les travailleurs avaient occupé les usines, c’est la propriété privée de celles-ci qu’ils auraient remis en cause.

Ils auraient pu transformer leurs bagnes de tous les jours en des lieux de discussion et d’organisation démocratique. Ils auraient pu les ouvrir à tous les exploités des alentours, aux ouvriers des petites entreprises, aux retraités, aux chômeurs, à tous ces prolétaires isolés qui se sont retrouvés sur les ronds-points.

Les entreprises prises en main par les grévistes seraient devenues des pôles de rassemblement, d’organisation et de direction de la lutte pour tous les exploités d’une région. Et tout cela sur une base prolétarienne, c’est-à-dire avec la possibilité d’inverser véritablement le rapport de force avec la bourgeoisie.

Cela ne n’est pas fait, mais cela se fera et c’est cette perspective que nous portons !

 

Les raisons de la colère sont là. Et la crise économique, la rapacité du grand patronat, et la politique anti-ouvrière du gouvernement vont se charger de les approfondir. Les explosions sociales sont toujours imprévisibles. Aucun parti, aucun syndicat ne peut les déclencher. Ce sont des phénomènes de masse qui leur échappent. Une simple étincelle peut mettre le feu à la plaine, dit le proverbe. Mais personne ne peut prédire quelle étincelle le fera.

En Algérie, le pouvoir de Bouteflika a duré 20 vingt ans. Il a été élu et réélu quatre fois et la dernière fois alors même qu’il n’était déjà plus physiquement présent. Et… La cinquième candidature a été la candidature de trop. Et maintenant la population à pris conscience de sa force, il ne lui suffit plus que Bouteflika soient officiellement écartés du pouvoir. C’est tout le « système » qui doit dégager comme ils disent !

Mais pour les travailleurs algériens le combat ne fait que commencer. Tous les mouvements de masse entraînent bien des couches sociales différentes : des ouvriers aux paysans, en passant par les patrons petits ou grands. En Algérie, même une des plus grosses fortunes du pays, un milliardaire originaire de Kabylie, Issad Rebrab, a même manifesté publiquement contre le pouvoir.

À chaque fois, les travailleurs et les plus pauvres forment le gros des troupes. La masse, c’est eux. Mais en général, ils en sont justement réduits à ce rôle de masse. Ils font masse mais ce ne sont pas eux qui dirigent.

Ce n’est que lorsque la classe ouvrière trouve le chemin de son organisation indépendante qu’elle peut réellement prendre conscience de sa propre force et qu’elle peut parler de sa propre voix.

Et lorsque la classe ouvrière se libère de la résignation, elle devient une puissance irrésistible. Dans une montée révolutionnaire, elle a la capacité de tout faire : de s’armer et décomposer l’armée en entraînant les soldats du rang. De renverser la police et la justice. De prendre tout en charge. De s’occuper des sans-abris en réquisitionnant les logements vides. D’organiser des cantines collectives pour nourrir tout le monde. De réorganiser les hôpitaux, les écoles, les transports et la production, non pas en fonction du profit mais en fonction des besoins de la société.

C’est cette capacité d’organiser la société qui en fait la classe révolutionnaire et lui donne les moyens d’apporter de vraies solutions à toutes les autres classes opprimées de la société.

Seule la classe ouvrière peut contrôler les banques et les obliger à accorder les crédits dont ont besoin les petits artisans et les petits commerçants. Elle seule peut empêcher les capitalistes de la grande distribution et de l’industrie agroalimentaire d’étrangler les petits paysans.

Mais pour que demain la classe ouvrière dirige la révolte des opprimés, elle doit aujourd'hui diriger la contestation sociale.

 

Les révolutions sont des évènements rares. Dans tous les pays industrialisés comme dans les pays pauvres, partout où il y a une classe ouvrière celle-ci a montré à maintes reprises de la combativité.

La grande leçon des révolutions ouvrières du passé, et surtout de celle qui a été l’événement le plus exceptionnel de l’histoire humaine des derniers siècles, la révolution russe du prolétariat de 1917, c’est que la classe ouvrière a besoin d’un parti révolutionnaire.

Pour pouvoir aller au bout de son combat, elle a besoin d’un état-major qui sache proposer aux travailleurs et aux masses populaires en mouvement une politique représentant leurs intérêts face aux différentes politiques de tous les partis bourgeois.

Un tel parti, même faible numériquement au départ d’une période d’explosion sociale, mais ayant une implantation dans les grandes entreprises, peut jouer un rôle décisif. En défendant une politique révolutionnaire, en levant le drapeau du renversement de la bourgeoisie par la classe ouvrière, il peut attirer à lui des pans entiers de la classe ouvrière et aussi des membres des autres classes opprimés.

Ce n’est que dans ces circonstances qu’il peut devenir un parti de masse faisant corps avec la classe ouvrière elle-même et lui permettre alors de prendre le pouvoir.

Sans un parti se fixant ces objectifs, les révoltes des exploités, aussi puissantes et profondes soient-elles, seront vouées à l’échec, ne pourront être que dévoyées ou écrasées. Et c’est la tâche fondamentale des révolutionnaires d’œuvrer à la constitution d’un parti révolutionnaire.

Nous n’avons pas l’illusion ni la prétention de penser que nous sommes le parti révolutionnaire qui permettra à la classe ouvrière de prendre le pouvoir. Ce parti est à construire.

Et nous pouvons avancer à partir de la petite organisation que nous sommes. En nous efforçant de proposer une politique aux travailleurs. En utilisant tous les moyens à notre disposition pour la faire connaître. Et encore une fois cette campagne électorale nous en donne l’occasion.

C’est en cela que les 15 jours qui nous séparent du vote sont importants, ce sont 15 jours de campagne, 15 jours où il faut se démultiplier !

 

Cette campagne électorale nous permet de rencontrer un milieu plus large que celui que nous côtoyons habituellement. Nous organisons des réunions publiques, comme celle-ci et d’autres beaucoup plus petites – mais tout aussi intéressantes ! – nous invitons des gens qui viennent pour la première fois à une réunion politique, nous faisons du porte à porte, nous allons sur les marchés, à la sortie des bouches de métro. Tout cela fait partie de la construction du parti.

Nous tous qui sommes dans cette salle ce soir, d’une certaine manière, nous participons à la construction de ce parti. Il y a parmi nous, ceux qui sont déjà membres de Lutte ouvrière, d’autres qui ne le sont pas encore.

Mais si vous vous retrouvez dans ce que nous avons dit ce soir, et si cela vous incite à vouloir convaincre autour de vous que la seule chose utile à faire pour un exploité dans ces élections c’est de voter pour la liste Lutte ouvrière, c’est de raisonner avec un point de vue de travailleur, alors vous aussi vous contribuer à la construction de ce parti.

Convaincre ses voisins, sa famille, ses collègues de travail qu’il faut que la classe ouvrière parle de sa propre voix, cela participe de la construction du parti. Toutes les discussions et les traces qu’elles laisseront dans les esprits, qui se traduiront pour certains par le geste bien concret de voter pour notre liste, tout cela participe de la construction du parti.

Après les élections, les urnes rangées, le travail continuera. Les nouveaux liens humains que cette campagne a permis peuvent persister sous forme de contacts maintenus ou de comités qui se réunissent dans les quartiers ou les villes ouvrières pour continuer de discuter entre travailleurs. Tout ce qui subsiste est précieux.

Même si aujourd’hui les travailleurs n’ont pas confiance en leur force collective et qu’ils subissent les coups redoublés de la bourgeoisie et de son État, nous avons une confiance totale dans leurs capacités à changer la société. Incarner cette perspective politique, la maintenir vivante en y gagnant des jeunes et des travailleurs sera un gage pour l’avenir.

Alors aidez-nous dans cette campagne !

Votez et faites voter contre le grand capital, le camp des travailleurs.

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