L'Est républicain : Pas de vacances pour les militants

ON LES RECONNAÎT à leurs pancartes et à l'infatigable rouge et blanc qui orne leurs banderoles. En cette fin de matinée pluvieuse, sur la place Maginot, à deux pas de la gare, un petit groupe d'hommes et de femmes bat le pavé, tracts et journaux à la main.
Étienne Hodara est militant Lutte ouvrière depuis 37 ans. Avec Guilhem, Franck, Katrine ou Geneviève, il s'installe ici tous les deux mois pour « montrer aux gens que certaines personnes croient encore pouvoir changer la société ».
La rentrée sociale en ligne de mire
À quelques semaines de la manifestation prévue le 7 septembre contre la réforme des retraites, les slogans en référence à la crise financière envahissent la plupart des affiches. « Pas question que les classes populaires payent cette crise à la place de ceux qui l'ont provoquée ». Étienne Hodara poursuit : « Notre influence est modeste, mais nous sommes persuadés qu'il faut lutter collectivement pour se défendre contre les abus des établissements financiers ».
Engager la discussion
Les idées sont connues et la rhétorique éculée, pourront dire certains. Mais devant les petits abris ballottés par le vent, les discussions s'engagent. Ici autour des salaires, là-bas à propos du coût de la vie. Bernard Krazer est retraité : « Il y a de moins en moins de gens qui partent en vacances, ils n'ont plus les moyens» affirme-t-il.
Place du marché, perdu au milieu des stands de vêtements familiers, un autre archipel éphémère se forme au gré des passages. « Il n'y a pas beaucoup de monde aujourd'hui » souffle Marilyne, militante et prof d'histoire-géo au collège. Le temps d'une cigarette ou de poser son vélo, ils sont tout de même quelques-uns à venir bavarder. Marie-Laurence, tout d'imperméable vêtue, décrit les « conditions de travail déplorables » qui règnent dans son service de neurochirurgie.
Parfois, au milieu des histoires similaires, une rencontre inattendue : engagé dans le 2e régiment étranger d'infanterie, Gaël a vu la Côte d'Ivoire, l' Afghanistan, le Kosovo. Il est de passage. « Le panneau m'a interpellé. Lutte ouvrière ça veut tout dire et rien dire. J'ai voulu qu'on m'explique un peu. »
Convaincu ou pas, le 7 septembre Gaël sera loin. Mais beaucoup de ceux qui discutaient avec les militants hier matin iront manifester.
Hélène FERRARD
© L'Est Républicain, Jeudi le 19 Aout 2010 / Nancy /