Le Dauphiné Libéré :  La (courageuse…) leçon de politique du professeur d’économie Nathalie Arthaud

Article de presse
12/01/2013

Très à l'aise, Nathalie Arthaud a su créer hier soir un climat de confiance avec les étudiants de Grenoble École de management. Du coup, cette improbable rencontre en a surpris plus d'un...

La question ne tarda pas à être posée à Nathalie Arthaud, candidate de Lutte ouvrière à l'élection présidentielle : pourquoi avoir accepté il y a plus d'un mois et demi de venir devant les étudiants d'une école de commerce ?

« J'ai l'habitude de répondre aux invitations ; j'allais à Mâcon, j'ai juste fait un crochet », lança sobrement la candidate aux quelque 300 étudiants dont l'association "Gem en débat" constituait la puissance invitante.

Alors, sur un scénario d'émission de télévision en prime time, Nathalie Arthaud commença par répondre au "billet d'humeur" - c'est la loi du genre - de Clément Ferreri, chutant sur « Si le communisme fonctionnait, ça se saurait... »

Nathalie Arthaud ne s'est pas démontée. Et, de l'avis même des organisateurs, c'est « sa sincérité, voire son authenticité » qui sut instaurer un climat de dialogue.

Et de rappeler que « les trotskistes furent dès 1923 les premières victimes du stalinisme à aller peupler les camps de concentration ».

Soit ! Mais aujourd'hui ? « Aujourd'hui, ce n'est pas une crise de la finance ; c'est la crise d'une économie capitaliste qui nous fait reculer des années en arrière. Je vous pose la question : y a-t-il eu une guerre ? Une catastrophe naturelle ? Non, on est en crise parce que la société produit trop de richesses ! On est dans une crise de surproduction. »

Bon. Mais pourquoi personne avant elle ? « Vous savez, Voltaire et Rousseau avaient tout décrit ! Mais ça ne suffisait pas ; il a fallu la force sociale de la Révolution... »

Que propose-t-elle, alors ? « Eh bien, justement, je n'ai pas un programme électoral, mais un programme de luttes ! »

S'il y a collectivisation de l'outil de production, s'il n'y a plus de profits, il n'y aura plus d'investissements...

« Parce qu'on vous apprend ça et vous le croyez ? Mais vous vous trompez lourdement ! Les profits vont très majoritairement au casino capitalistique, pas à l'investissement... Je vais prendre un exemple qui va vous surprendre : la Nasa, c'est le public ! Vous croyez qu'un trust privé, les yeux rivés sur le rendement à court terme, aurait pu faire tout ça ? »

Alors, dans un silence surpris, Nathalie Arthaud a enfoncé le clou : « Le communisme, ce n'est pas le retour à la bougie ! C'est s'appuyer sur tout ce progrès accumulé pour aller plus loin... Mon problème, ce n'est pas d'exproprier le boucher du coin qui fait très bien son boulot et tout seul. »

Et puis la candidate de Lutte ouvrière aura su passer de la grande histoire à l'anecdote, de Karl Marx aux frais de campagne d'Arlette Laguiller en 1995 (lire en Repères).

Alors, Max Godet a demandé à Nathalie Arthaud d'expliquer à l'auditorium pourquoi les étudiants de Gem devraient... voter pour elle !

« J'espère simplement que vous comprendrez un jour que vous avez intérêt à lier votre sort à celui de ceux qui sont utiles, des travailleurs, des exploités. Pensez-vous échapper à ce fléau qu'est le chômage ? Aucun cadre, aucun ingénieur ne peut aujourd'hui se sentir épargné... »

par Philippe GONNET

Photo Le DL/Ph. G.

© Le Dauphiné Libéré (Edition Isère sud)