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Macron cherche majorité
Le président, sa Première ministre et leurs soutiens ont beau affirmer que le rejet de la motion de censure vaut approbation de la réforme des retraites et qu’ils peuvent désormais revenir aux affaires courantes, rien n’est moins vrai.
D’une part, le combat des travailleurs contre cette réforme continue. D’autre part, les deux mois de lutte, de grèves et de manifestations ont mis en lumière la faiblesse de ce gouvernement et de ce président.
Macron, au-delà des questions financières et des économies sur les salaires et les pensions, veut imposer sa réforme pour faire plier les travailleurs. Y parvenir serait à la fois une démonstration politique portée à son crédit d’homme du capital et un service rendu à la classe dominante, dans la perspective d’autres attaques. Or, non seulement sa politique a mis des millions de travailleurs dans la rue, mais Macron n’a même pas réussi à rallier un nombre suffisant de députés de droite. Ses ministres ont été pris en flagrant délit de mensonges et Borne a dû avoir recours aux procédés les plus politiciens pour parvenir à ses fins, et encore.
Cette faiblesse politique vient de plus loin que la simple obstination à imposer une réforme impopulaire. Une fraction de plus en plus large de la population constate que les gouvernements travaillent uniquement pour les plus riches, Macron poussant le trait jusqu’à la caricature. De là dérivent des faits comme l’abstention massive aux élections, le mouvement des Gilets jaunes, les records d’impopularité et, en définitive, les tractations au parlement. De là vient aussi le fait que le RN et Marine Le Pen se présentent comme des défenseurs des petites gens et recueillent leurs voix.
Quoi qu’il en soit, la classe capitaliste a besoin d’un gouvernement qui gouverne et prenne les décisions qui lui sont nécessaires, alors que la situation économique, sociale et même militaire est grosse de tempêtes. Macron a cependant bien du mal à affirmer son autorité. Pour l’asseoir au moins au niveau parlementaire, une solution serait de tenter de constituer une nouvelle majorité, en y intégrant tout ou partie de la droite. Or le récent épisode vient de montrer à quel point les députés LR sont peu fiables. Les députés de droite préfèrent visiblement tenter de garantir leur réélection plutôt que rejoindre un navire en train de couler. Le président peut aussi être tenté de dissoudre l’Assemblée et de provoquer de nouvelles élections. Mais il risque alors de se retrouver sans majorité, voire dans l’obligation de cohabiter avec une autre majorité. On pourrait ainsi voir Macron, élu comme prétendu rempart à Le Pen, devoir s’appuyer sur les députés du RN pour gouverner.
Lors de son interview télévisée, le 22 mars, en plus de faire étalage de son autosatisfaction et de son mépris habituel, il a laissé entendre qu’il continuera à gouverner en s’appuyant sur les possibilités offertes par la constitution. Le pouvoir laisserait ainsi les députés s’affronter sur des questions accessoires, tandis que l’État gérerait sous l’autorité de l’Élysée les affaires importantes, comme la diplomatie, les subventions aux grandes entreprises, les budgets et interventions militaires, la répression policière et le blocage des salaires, par exemple. Après tout, ôté le verbiage des partis de gouvernement, c’est bien là le fond du fonctionnement réel des institutions, aussi vieux que la république elle-même.
Cette crise politique, aidée par l’entrée en mouvement de millions de travailleurs, peut contribuer à en convaincre des millions d’autres par le simple fait qu’elle démontre l’illégitimité du pouvoir. Il reste à voir, derrière le théâtre d’ombres politiques, en crise ou pas, l’illégitimité de la classe capitaliste et de son État.