Jean-Pierre Mercier : “l’internationalisme de la classe ouvrière”22/05/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/05/une_2912-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

La Fête de Lutte Ouvrière

Jean-Pierre Mercier : “l’internationalisme de la classe ouvrière”

[…] Dans cette campagne, les frontières sont défendues y compris par les partis de gauche, qui prônent, exactement comme le RN, plus de protectionnisme, en expliquant qu’il faudrait craindre la concurrence des ouvriers mal payés d’Ukraine, de Moldavie ou de Chine !

Mais c’est précisément parce que le grand patronat a toujours mis en concurrence les exploités des différents pays que les militants ouvriers, socialistes et communistes, ont construit à plusieurs reprises des Internationales ouvrières. C’est pour cela qu’ils ont cherché à coordonner leurs luttes et leurs revendications, comme lors de la journée du 1er mai ou de celle du 8 mars, consacrée à la lutte des femmes. C’est pour cela que tous les partis ouvriers, lorsqu’ils étaient encore révolutionnaires, étaient d’abord et avant tout inter nationalistes.

Déjà en 1845 Marx écrivait : « La nationalité du travailleur n’est pas française, anglaise, allemande, elle est le travail, le libre esclavage, le trafic de soi-même. Son gouvernement n’est pas français, anglais, allemand, c’est le capital. L’air qu’il respire chez lui n’est pas l’air français, anglais, allemand, c’est l’air des usines. »

C’était en 1845. C’est encore plus vrai aujourd’hui, en 2024, alors que la classe ouvrière s’est partout constituée grâce à la succession de vagues d’immigration et alors que le capitalisme s’est imposé sur toute la planète, et que la nécessité de survivre pousse des millions de femmes et d’hommes à s’installer là où ils espèrent trouver du travail.

C’est cet te réalité-là que tous les politiciens de la bourgeoisie cherchent à dissimuler, qu’ils soient de droite, d’extrême droite ou de la gauche réformiste. Et, d’un seul et même élan, tous de nous endormir avec leur patriotisme économique et des idées comme le « produire français », qui sont des stupidités !

Prenez l’entreprise Toyota de Valenciennes, où travaillent deux camarades ici présents, Éric Pecqueur et Édith Duquesnoy. C’est un groupe à capitaux japonais. Toute une partie des installations vient du Japon. Mais l’entretien annuel ou les transformations sont assurés par une entreprise britannique, employant majoritairement des salariés polonais. Les colonnes de direction sont fabriquées en République tchèque.

Comme dans la plupart des entreprises, toute une partie des fameuses puces électroniques, indispensables, viennent de Taïwan. Les mousses insonorisantes viennent de Turquie. Une majorité de pièces sont transportées à travers l’Europe par des chauf feurs tchèques, polonais, ukrainiens ou lituaniens.

Les 5 000 salariés de l’usine, dont une grande partie sont des intérimaires, viennent du Maghreb, du Sénégal, du Mali, de Guinée Conakry, d’Afghanistan, et leurs fiches de paie sont faites en Pologne…

Alors non, on ne produit pas français. En revanche, on produit bien sous les ordres des capitalistes, avec leur organisation à l’échelle internationale. On peut la trouver stupide et aberrante, et elle l’est par bien des aspects, mais si on en veut une autre qui corresponde aux intérêts des travailleurs du monde entier et qui respecte la planète, il faut exproprier les actionnaires et prendre le contrôle des multinationales. Tout le reste est du baratin, qui revient à mettre les travailleurs à la remorque de la bourgeoisie !

Un des aspects les plus révoltants de l’UE, c’est qu’elle est en train de se barricader. En 2014, l’Union européenne comptait 300 kilomètres de barrières et murs frontaliers, elle en compte aujourd’hui plus de 2 000.[…]

L’Europe unie et sans frontières, où l’on pourrait circuler librement de l’Atlantique à l’Oural, de la mer du Nord au Bosphore et à la Méditerranée, et s’enrichir de la diversité des cultures, est une idée fantastique.

Le morcellement de la planète, la persistance et même la multiplication des front ières et du nombre d’États font partie des aspects les plus réactionnaires du capitalisme, parce que la puissance des forces productives a dépassé depuis fort longtemps les limites imposées par toutes les frontières.

L’avenir, même pour les peuples opprimés, n’est pas à la création de nouveaux États, mais à leur fédération, et à l’unifi cation de l’économie et de la société à l’échelle de continents entiers.

Alors oui, notre perspective est bien celle d’une Europe sans frontières. Plus même, nous aspirons à un monde où chaque être humain pourra dire : « Mon pays, c’est la terre, ma patrie, c’est l’humanité. »

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