Russie : à bas la répression !24/12/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/12/une_2995-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Russie : à bas la répression !

Le Kremlin a décidé que d’ici 2027 chaque Russe devra faire enregistrer son portable, en fait son IMEI (identifiant international d’un équipement mobile), et qu’en 2028 seuls les mobiles en règle auront accès au réseau.

Il s’agirait de contrer la fraude et les malfaiteurs. Mais peu de monde peut y croire, tant il est clair que cette mesure, qui facilitera la surveillance des opposants, s’inscrit dans une politique de serrage de vis accru contre quiconque conteste le régime.

Dernière en date, la très lourde condamnation de cinq membres d’un cercle marxiste d’Oufa, une ville de 1,2 million d’habitants qui est la capitale de la Bachkirie et de l’industrie pétrolière russe. Le tribunal militaire d’Ekaterinbourg, dans l’Oural, vient de leur infliger des peines de 16 à 22 ans de prison.

Ils voulaient, selon l’accusation, profiter d’une « aggravation de la situation politique et sociale » pour tuer des policiers, s’emparer de leurs armes et organiser un pouvoir communiste. Lors de perquisitions, la police aurait saisi des grenades assourdissantes, une pelle de sapeur, une carabine de chasse et de la « littérature extrémiste » (des livres de Marx, Engels et Lénine), autant de preuves d’une tentative… de renverser l’État russe !

Les accusés, qui ont rejeté ces allégations, ont accusé policiers et gardiens de prison de les avoir plusieurs fois tabassés et torturés pour qu’ils signent les « aveux dont l’accusation avait besoin ».

Ce cercle, qui réunissait 10 à 20 personnes depuis 2016, avait fini par attirer l’attention de la police politique. Le FSB y envoya donc un provocateur, qui a servi de témoin à charge au procès, et quand il estima avoir de quoi monter une affaire, il arrêta les membres du cercle en mars 2022. Ils avaient donc déjà subi près de quatre ans d’incarcération avant de passer en jugement.

Dans leur intervention finale, ils ont qualifié ce procès d’« exécution politique » et les réquisitions du procureur – jusqu’à 22 ans de prison – comme une « façon discrète de les fusiller ». C’est indéniable. Le régime veut faire peur en frappant de plus en plus fort toute voix discordante. Y compris des gens ayant parfois soutenu la politique du Kremlin, tels trois membres de ce cercle partis combattre dans le Donbass en 2014 ! Quant à Sergueï Oudaltsov, le chef du Levyi front (le Front de gauche), un parti néostalinien dont le cercle était proche, il avait beau avoir approuvé l’« opération militaire spéciale » en Ukraine, Poutine le fit incarcérer en 2023 pour avoir « justifié le terrorisme » en prenant la défense des militants d’Oufa.

Cette accusation revient dans plusieurs procès contre des militants d’extrême gauche, car le cas du cercle d’Oufa n’est pas unique. Malgré la répression, de petits groupes surgissent de façon fréquente dans différentes villes de Russie, composés le plus souvent de jeunes qui cherchent à renouer comme ils le peuvent avec le combat pour le socialisme.

Depuis une dizaine d’années, des militants se disant anarchistes, antifascistes, plus souvent se revendiquant du passé stalinien, mais aussi parfois du trotskysme, sont tombés entre les mains de la « justice » à Penza, Omsk, Moscou, Saint-Pétersbourg, condamnés de 6 à 18 ans de prison, souvent après avoir été torturés. Tioumen, Kansk, Rostov-sur-le Don ont aussi connu de tels procès, généralement par une juridiction militaire.

Il est bien difficile de savoir quelle activité ont ou avaient ces petits groupes, et sur quelle base politique, certains tel celui d’Oufa ayant été – ce qu’il a cher payé – ouverts à des représentants de courants fort éloignés du marxisme. Mais une chose est certaine : malgré une répression qui s’aggrave, le régime ne parvient pas à extirper la « mauvaise herbe » qu’il qualifie d’extrémiste ou de terroriste et dont tout indique qu’il craint qu’un jour, sortant de cercles refermés sur eux-mêmes, elle ne se répande dans de larges masses et au sein de la classe ouvrière de Russie.

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