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Editorial
Salaires : se préparer à engager le combat contre le patronat
Avec leur projet de loi sur le pouvoir d'achat, Macron et Borne prétendent ″répondre à l'urgence″.
Oui, il y a urgence pour les millions de travailleurs qui n'arrivent plus à vivre de leur salaire. S'en sortir est encore plus difficile quand on est plongé dans la précarité. Mais parler de ″pouvoir d'achat″ est une escroquerie. Le pouvoir d'achat des travailleurs provient exclusivement du salaire qu'ils gagnent en produisant tout ce qui est utile à la société, en plus des milliards de profits engrangés par les capitalistes. Or, les mesures du gouvernement sont calibrées pour ne rien coûter au grand patronat et surtout ne pas l'obliger à augmenter les salaires.
Pour ceux qui dépensent une partie de leur paie en carburant pour aller travailler, une nouvelle indemnité remplacera la remise de 18 centimes par litre. Par ailleurs, huit ou neuf millions ″de foyers les plus modestes″ toucheront quelques centaines d'euros sous forme de chèque alimentaire. Des bons d'achat pour compenser des salaires de misère !
Oh, les employeurs sont sollicités pour verser une « prime Macron » ! Pour les encourager, le plafond de la défiscalisation a été relevé de 1 000 à 3 000 euros, et même 6 000 si un accord d'intéressement est signé. Mais rien ne les oblige à verser cette prime. C'est ″à votre bon cœur, messieurs les patrons″ !
Alors que l'inflation annuelle va dépasser les 6 %, les fonctionnaires, dont les salaires sont bloqués depuis six ans, devraient se contenter d'une augmentation de 3,5 % au 1er juillet. Quant aux retraités, ils devraient dire merci pour une revalorisation de 4 % de leurs pensions.
Macron et Borne, comme tous les politiciens au pouvoir, ont pour fonction de défendre les intérêts de la bourgeoisie tout en évitant une explosion de colère parmi les classes populaires.
D'un côté, ils continuent à baisser les impôts payés par les capitalistes, malgré leurs profits faramineux. Ceux-là même qui se gavent en faisant monter les prix de l'énergie exigent que l’État finance la transition énergétique en construisant de nouvelles centrales électriques, subventionnant les industriels pour verdir leurs productions ou les constructeurs automobiles pour remplacer les moteurs thermiques par des moteurs électriques. C'est d'ailleurs pour continuer à fournir aux capitalistes de l'électricité à bas prix que Borne a annoncé la renationalisation d'EDF.
De l'autre côté, ils redoutent que l'inflation ne provoque une révolte du type des gilets jaunes ou, plus inquiétant pour eux, une vague de grèves dans les entreprises. La crainte d'une mobilisation face à l'inflation est la raison d'être des gesticulations du gouvernement sur le pouvoir d'achat.
Dans différents endroits du pays, des travailleurs expriment leur colère devant leurs salaires trop faibles. Certains débrayent quelques heures, d'autres ont fait plusieurs jours de grève. Certains réclament 100, 200 ou 300 euros d'augmentation. D'autres refusent les propositions méprisantes de leur patron et débrayent d'abord pour se faire respecter. Si la grève des travailleurs des aéroports parisiens ou celle des cheminots le 6 juillet ont été relayées par les médias, la plupart ne sont pas médiatisées. Mais parfois, une petite victoire dans une entreprise donne l'énergie aux travailleurs de l'usine voisine pour se mobiliser à leur tour. Toutes ces grèves sont des réactions élémentaires de défense.
Mais pour arracher au patronat les augmentations de salaires indispensables puis leur indexation sur la hausse des prix, seule façon de ne pas tout reperdre en quelques mois, des grèves isolées ne suffiront pas. Il faudra qu'elles se généralisent et deviennent explosives. Cela ne se décrète pas, mais les travailleurs conscients doivent s'y préparer, défendre cette perspective autour d'eux.
Les responsables politiques de la bourgeoisie, eux, se préparent. Ils savent que l'inflation n'est pas provisoire et qu'elle ne résulte pas de la guerre en Ukraine, mais de la guerre économique que se livrent les grands groupes capitalistes mondiaux pour accaparer le maximum de profits. Ils savent que leur système est de plus en plus instable, que l'inflation et la misère provoqueront des révoltes, comme au Sri Lanka où des centaines de milliers de manifestants ont provoqué le départ du président.
Pour faire payer la crise aux classes populaires, la bourgeoisie a une politique et de multiples politiciens pour la mener sous des habillages différents. Pour se défendre, le camp des travailleurs doit avoir la sienne : contraindre le grand patronat à prendre sur ses profits faramineux pour augmenter les salaires et les indexer sur les prix.
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