Nos lecteurs écrivent Chantiers ou maisons de fous ?07/02/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/02/2897.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Nos lecteurs écrivent Chantiers ou maisons de fous ?

Je travaille dans le bâtiment, chez un sous-traitant de sous-traitant de sous-traitant de Bouygues. La sous-traitance dans ce secteur n’a rien de nouveau mais, alliée à un sous-effectif chronique de plus en plus important, elle transforme les chantiers, y compris ceux du Grand-Paris, en maisons de fous.

En effet, c’est la valse des sous-traitants qui vont et viennent de chantier en chantier, souvent à contre-temps, tous les corps de métiers ne travaillant pas au même rythme, ni en même temps. Par exemple, il faut que les maçons aient posé les fondations et monté les murs pour que les couvreurs installent les toitures. Le souci est qu’avec la sous-traitance généralisée, c’est la quadrature du cercle à organiser. Avec, en plus, le sous-effectif, le bazar devient total, car tous les chantiers sont en retard. Résultat : tout le monde court partout, mais personne n’est au bon endroit au bon moment. On nous envoie en catastrophe dans les chantiers les plus en retard, avec une pression énorme pour finir le boulot vite et mal, et éviter au maximum les pénalités, mais pas la fatigue et les accidents qui se multiplient. Et, comme les chantiers où on devait être prennent du retard, les autres corps de métier ne peuvent pas avancer...

Plutôt que d’embaucher, tout ce que savent faire nos directions, c’est d’essayer de nous mettre la pression et nous mettre en concurrence les uns avec les autres : aux embauchés, on dit que les prestataires ne savent pas travailler, aux prestataires, que les embauchés sont des feignants, on essaye de monter les différents prestataires les uns contre les autres, même si souvent ils sont des filiales des mêmes groupes !

Face à cette incurie généralisée, les travailleurs ne sont pas dupes, et la seule chose qui permet de tenir est la solidarité : essayer de s’aider à avancer quand on peut, ou bien partager les fournitures, les bleus et les équipements de protection avec les prestataires qui n’ont rien.

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