Arrêts maladie : chasse aux sorcières chez les médecins20/03/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/03/2903.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Arrêts maladie

chasse aux sorcières chez les médecins

Dans sa course à la réduction des dépenses publiques, le gouvernement a les arrêts de travail en ligne de mire. Selon lui, certains médecins prescriraient trop d’arrêts, mais cette propagande se fiche de la réalité.

Le nombre d’arrêts de travail prescrits a augmenté en dix ans, passant de 6,4 millions en 2012 à 8,8 millions en 2022. Mais les médecins accusés de prescrire trop d’arrêts maladie expliquent facilement leur augmentation par l’aggravation des conditions de travail, la dégradation des conditions de vie et le recul de l’accès aux soins. Le manque de spécialistes, par exemple, entraîne des délais de plusieurs mois pour un rendez-vous chez un orthopédiste ou un rhumatologue et, de fait, une dégradation de l’état de santé de nombreux malades.

Le coût croissant des médicaments et celui des soins aggravent aussi le contexte sanitaire global. Que devrait alors faire un généraliste voyant arriver dans son cabinet une personne dans un état dégradé ? Il peut au moins prendre en charge sa douleur et lui permettre de prendre du repos.

L’Assurance maladie a identifié 6 000 médecins ayant selon elle prescrit trop d’arrêts de travail en comparaison avec une moyenne nationale qui ne veut rien dire. Cette approche statistique est à la fois aberrante et révoltante. Quelle signification a une telle moyenne qui mélange les médecins des différents quartiers, qu’ils soient populaires ou très aisés ?

Les médecins sanctionnés peuvent être « mis sous objectif ». Ils doivent alors réduire leurs prescriptions d’arrêts maladie de 15 à 20 %. Mais comment faire ? Un médecin témoigne que, ne voulant pas changer ses diagnostics, il a réduit son temps de travail et envoyé une partie de ses patients voir ailleurs. La sanction de l’Assurance maladie a ainsi eu pour conséquence de réduire encore l’offre de soins.

D’autres médecins peuvent être mis sous tutelle : leurs arrêts prescrits doivent être validés par l’Assurance maladie. L’un d’eux a contesté cette sanction, est allé devant une commission et a fait reculer l’Assurance maladie, la commission elle-même reconnaissant l’aberration de la mesure. Pourtant, sans la combativité de ce médecin, elle aurait été appliquée. Au final, ces pressions poussent à bout des médecins qui en arrivent à être « proches de la rupture d’un point de vue moral et psychologique » selon un représentant d’un syndicat de généralistes.

L’État prétend faire des économies. Mais alors, pourquoi ne s’attaque-t-il pas au marketing des trusts pharmaceutiques, qui dépensent des sommes ahurissantes pour promouvoir leurs médicaments ? Pourquoi ne rend-il pas public le rapport entre le prix de remboursement des médicaments par la Sécurité sociale et leur coût de production ? On verrait alors à quel point l’argent de la Sécurité sociale enrichit les grands groupes pharmaceutiques. Mais l’État préfère faire la chasse aux moins fortunés et à ceux qui leur viennent en aide.

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